lundi 21 décembre 2020

Exposition Hans Hartung 2020

La Fabrique du geste, Hans Hartung, Musée d'art moderne de Paris, 2020

      
Autoportrait 1922                         
« Je déguste la nature et la vie comme chacun, ça n’a rien à faire avec ma position picturale. » Hans Hartung
   Autoportrait 1943 Crayon sur papier

Hans Hartung (1904-1989) est né à Leipzig et fut blessé pendant la Grande guerre où il perd un pied. Il peindra jusqu'à la fin dans son fauteuil roulant, avec des assistants, dans son atelier d'Antibes. Le peintre a aussi procédé à des expérimentations utilisant par exemple la branche de genêt imprégnée de peinture pour frapper sur la toile, le pistolet à air comprimé, la serpette, la sulfateuse à vigne. Non seulement il peint mais encore il pulvérise, gratte et brosse la toile avec passion. 

      
Gouache sur papier 1940      Le grand cheval, 1922             

Il avait également bien des centres d’intérêt comme la photographie, les mathématiques, le latin ou l’astronomie.

  Trois personnes assises, 1923

À l’occasion de sa réouverture après d’imposants travaux de rénovation, le Musée d’Art Moderne présente une rétrospective du peintre Hans Hartung.


Huile sur bois 1938            T1933-3 Huile sur toile    T1936-2, Huile sur panneau Célotex

Une exposition d’autant plus attendue que la dernière rétrospective date de 1969. Elle nous permet en tout cas de jeter un regard différent sur l’œuvre de ce peintre essentiel du XXe siècle et du rôle qu’il a joué dans l’histoire de l’art car il fut un précurseur de l’abstraction, l’une des avancées majeures de son siècle.

             
Hartung à Antibes en 1975

C'est à partir de 1932 qu'Hartung se tournera définitivement vers l'abstraction, caractérisée par l'effacement du référent, la structure de l'espace en plans, le fonds et les formes indifférenciés, reliquat de son passé cubiste. 

   
Dans son atelier antibois                    T 1945 Huile sur toile
avec son pistolet

Sa soif de liberté, son style s’inscrivent dans ce siècle terrible de la montée du fascisme dans l’Allemagne son pays d’origine, aux difficultés de l’après guerre dans une Europe déstabilisée par les problèmes socio-économiques.

 
T1938-16 Collage sur panneau de bois         Huile sur toile, 1934

En 1968. Anna-Eva et Hans Hartung, divorcés puis remariés, font construire près d’Antibes une maison avec des ateliers. Hartung est alors célèbre mais il continue ses recherches obstinées sur la peinture vinylique pulvérisée, les éclaboussures, l'utilisation de balais en genêt.

    P1958-238 Pastel sur papier

Le peintre s'intéresse surtout à la lumière, son rayonnement sur la toile, renoue aussi avec « la terreur ensorcelante » des orages de sa jeunesse.

  Pastel sur papier, 1952

Il recherche l'éclat des éclairs qu’il tentait de reproduire dans ses cahiers, cette explosion des éléments qui déclenchait en lui ce qu'il appelait « l’urgence de la spontanéité. »

           
T1947-12 Huile sur toile  T1955-9 Huile sur toile          

L’exposition elle-même comprend un ensemble de quelque trois cents œuvres provenant de collections du monde entier et plus particulièrement de la Fondation Hartung-Bergman. Ce sera aussi l’occasion de mettre en lumière les quatre œuvres dont le musée a fait l’acquisition en 2017.

 
T 1948-18 Huile sur toile                 T 1966-K40   vinyle sur toile

Elle met en lumière la diversité des innovations techniques qu’il a initiées dans le cadre d’expérimentations qui ont toujours été sa préoccupation, que ce soit ses recherches sur le format et la couleur à partir d’une méthodologie, le cadrage, la photographie, l’agrandissement, la répétition et les copies de ses propres œuvres. Ses recherches ont influencé nombre de ses contemporains à l’instar d’un Pierre Soulages qui a toujours reconnu ce qu’il devait à Hartung.

         
Composition gouache 1970              Composition 1973

Cette rétrospective s'articule autour de quatre grandes sections où l'on trouve des tableaux bien sûr, mais aussi des photographies, très importante pour lui et sa recherche artistique, auxquelles il faut ajouter des œuvres graphiques, des éditions illustrées, des oeuvres sur céramique... et même des galets peints.

            
  T1971-R24, 1971, acrylique sur toile   T1973-E12, 1973, acrylique sur toile


Elle est complétée par des documents d’archives, livres, correspondances, carnets, esquisses, journal de jeunesse, catalogues, cartons d’invitations, affiches, photographies, films documentaires...

            
  T1982-R11, 1982, acrylique sur toile   T1987-H5, 1987,  acrylique sur toile

Au-delà de son rôle de précurseur, on peut dire que le fil rouge de l'exposition est cet espèce de dialogue qui s'instaure entre l'esthétique de l'abstraction née de son rôle de précurseur et sa vision d'un art tourné vers l'avenir.

                
T1989-K32, acrylique sur toile       T1 1962-L21, T1 1962-L22, T1 1962-L23

Voir aussi
* France Culture, Entretiens -- Spectacle-sélection --
* L'abstraction lyrique, éditions L'Objet d'Art hors-série n° 24, par Vidalinc Marie-Jo - d'Alincourt Nathalie, Paris 1945-1956, Hans Hartung pages 41-71

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jeudi 17 décembre 2020

Jean-François Millet et Vincent Van Gogh

Ce thème, basé sur l'influence de Millet sur Van Gogh, rappelle la très belle exposition qui s'était tenue au musée d'Orsay en 1998-99, qui mettait en valeur la belle collection du musée, complétée en l'occurrence par quelques prêts d'autres musées. On peut aussi se procurer le superbe livret de l'exposition, intitulé simplement Millet Van Gogh : Exposition Musée d'Orsay, 181 pages, publié aux éditions Rmn. (Réunion des musées nationaux) 

 
Jean-François Millet (1814-1875)  et Vincent Van Gogh (1853-1890)

Vincent Van Gogh alors âgé de 22 ans découvrit un jour des tableaux de Jean-François Millet  et ce fut pour lui une révélation.
Jean-François Millet sera alors pour le jeune peintre un guide et une référence, écrira son frère Théo Van Gogh dans l'une de ses lettres.

     
La sieste : Millet 1866 et Van Gogh 1889

Si Van Gogh a donné plusieurs versions du Semeur, et il a aussi copié de nombreuses œuvres de Millet parmi lesquelles on peut citer Soir d’hiver, La Fin de la journée, Hiver, la plaine de Chailly, La Tonte du mouton, Le Batteur

         
Van Gogh, d'après Millet : La fileuse et Les sarcleuses

Au cours de l'automne et de l'hiver 1889-1890, alors qu'à la suite de l'épisode de "l'oreille coupée", Van Gogh se trouvait à l'asile de Saint-Rémy, il peindra vingt et une copies d'après Millet, qu'il admirait particulièrement.
Ce travail de copie il le concevait comme des improvisations, des libres interprétations qu'on pourrait comparer à un travail d'un musicien jouant la partition d'une œuvre écrite par un autre compositeur.

        
Les premiers pas : Millet 1853 et Van Gogh 1890

Van Gogh n’a pas tout de suite révélé qu'il réalisait des copies de Millet, contrairement à Delacroix qui l’avait fait pour Rubens, Manet , Degas et Vélasquez.  “Certains sont copiés d’autres pas, j’ai commencé par hasard, puis j’ai appris et me suis inspiré de ce compagnonnage " disait-il.
 Van Gogh a commencé à copier des peintres comme Delacroix, Rembrandt, Doré, puis il passa progressivement à Millet.

       
La femme au râteau : Millet 1854 et Van Gogh 1889

Van Gogh, tenta d'atteindre  par huit fois le niveau du semeur de Millet mais finit par abandonner comme son frère Théo le lui avait suggéré.
“Je quitte parce que je n’arriverai jamais à la hauteur du semeur”. Par cette réflexion, on peut mieux mesurer le perfectionnisme de Van Gogh.

       
Le semeur : Millet 1850 et Van Gogh 1881

Dans l'esprit de Van Gogh, copier permettait aussi de produire une œuvre de facture nouvelle, et on mesure bien cette différence en comparant les tableaux composés sur le même thème, les couleurs beaucoup plus vives de l’impressionnisme mises en parallèle avec  les couleurs sombres d'un classique comme  Millet.

      
Sur la route du travail : Millet 1855 et Van Gogh 1890

       
Le bûcheron : Millet 1856 et Van Gogh 1889

On peut ainsi constater qu'un même thème peut être traiter de façon fort différente selon la technique utilisée et l'idée que se fait le peintre de l'esthétique. En ce sens, il est également représentatif de son époque et des tendances qu'elle représente et dont elle est l'expression.

   
Les travailleurs de la terre : Millet 1854 et Van Gogh 1889

On peut noter que Van Gogh a réalisé assez tard ces différentes ont été réalisées, centrées sur les années 1889-90, ce qui signifie sans doute qu'il est en pleine réflexion sur sa façon de peindre et de concevoir.

      
Les tondeurs de moutons : Millet 1852 et Van Gogh 1889

Les toiles qu'il peint sur le modèle de Millet ne comptent pas parmi ses œuvres les plus connues, elles représentent le plus souvent des personnages pris dans leurs tâches quotidiennes, alors que Van Gogh a peint beaucoup de paysages.


Van Gogh, d'après Millet : la bergère, Le faucheur à la faucille et La lieuse de gerbes

l'exception est sans doute celle sur La nuit étoilée qui  montre bien le rapport qu'il pouvait avoir avec son sujet, ici Nuit étoilée sur le Rhône, très différente de son autre tableau intitulé Nuit étoilée qu'il peindra l'année suivante et et qui est très représentatif de l'évolution de son style pendant la période où il résidera à Saint-Rémy de Provence.

    
La nuit étoilée :  Millet 1860 et Van Gogh 1888

Voir aussi
* Millet, peintre de la condition humaine --

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