Cardona, entre château et gisement de sel
Située dans les montagnes à quelque 70 kilomètres à l’ouest de Barcelone, la ville de Cardona est surtout connue pour sa mine de sel et son château bâti sur une colline dominant la ville.

      

Le parc culturel de la "montagne de sel"
Le sel, denrée si essentielle pendant si longtemps, et de si juteux profits, aussi bien pour les producteurs que pour les états qui prélevaient leur (grosse) dîme au passage. La ville de Cardona en a longtemps beaucoup bénéficié, le centre ville en témoigne encore. Mais la mine a fermé et Cardona a fait grise… mine.

         
Statue de mineur à l’entrée          Exemple de configuration extérieure


Il en reste aujourd’hui au temps de la reconversion une belle visite dans cet antre souterrain d’une blancheur saline digne d’une lessive traitée aux enzymes.
Belle visite de cette grotte (artificielle, creusée par des mineurs) avec ses stalactites, plus rarement ses stalagmites d’un blanc éclatant, avec ses inflorescences salines d’un blanc étincelant et parfois  somptueux ou de rouges teintés par la ferrite, veinés de blanc et de différents tons de brun.


Stalactites et stalagmites                              Coulées sur la paroi latérale


La salle corail
Témoin cette salle dont les stalactites et autres stalagmites rappellent justement les coraux marins. On peut non seulement observer mais aussi écouter ces gouttes d’eau salée qui s’écoulent avec la lenteur d’un temps rythmé par l’eau, du sol au plafond et du plafond au sol jusqu’à se rejoindre en colonnes de sel qui bourgeonnent et s’épanouissent en corolles blanches et en bouquets.
Un sel rougeâtre (la carnallite ou sel de magnésium) veine le plafond d’une texture rugueuse qui projette des reflets sur les parois brunes. Sa structure a la propriété de n’être pas cubique mais faite de prismes asymétriques (dite structure rhomboïde).   


Exemples de concrétions


Sainte Barbe et l’échelle "salée"
À travers un ensemble d’inflorescences, on peut imaginer la statue de Sainte Barbe, patronne des mineurs. C’est pourquoi elle est encore largement fêtée à Cardona tous les quatre décembre.
On peut aussi découvrir les objets qu’utilisaient les mineurs aux époques anciennes, une cruche de bois pour éviter la déshydratation, une mèche qu’on martelait pour percer des trous qu’on pouvait ensuite remplir de cartouches de poudre… Parmi ces objets, une vieille échelle figée dans une couche de sel, se dresse comme un symbole de cette époque.

    
  Stalactites Inflorescences          L'un des tunnels visitables


La chapelle sixtine
Non, nous ne sommes pas à Rome bien que cette salle s’appelle la Chapelle Sixtine, métaphore pour exprimer les superbes couleurs de sa partie frontale… une Chapelle Sixtine naturelle en quelque sorte.
C’est pour rechercher le précieux sel potassique qu’on ouvrit cette immense salle qui fut fermée après l’échec de cette prospection.
Sur l’ensemble du site, on a recensé quelque 300 kilomètres de galeries souterraines.

L’extérieur et l’exploitation du terril
À la sortie, une énorme barre montagneuse grisâtre ferme l’horizon. Elle provient des déblais stériles entassés de sel et de sédiments dus à l’exploitation du sel entre 1929 et 1972. Après cette date, les rejets furent entièrement recyclés jusqu’à la fermeture de la mine en 1990.  Cela permet de suivre l’évolution des techniques disponibles jusqu’aux périodes les plus récentes.

   
La montagne avec l’entrée en bas                    Plate-forme de sel

Cardona, son château et son église Saint-Vincent
Le palais seigneurial a subi les vicissitudes des guerres et des conquêtes qui marquèrent l’Espagne du XVIIe jusqu’à la période franquiste. Il connut plusieurs moments forts, autant comme "grenier à sel" que comme position stratégique dominant toute la zone de la Catalogne centrale.

     

Pendant la guerre de succession d’Espagne (1701-1714), Cardona ayant pris parti pour Charles d’Autriche, subit les assauts de s armées françaises du futur Philippe V. (On peut voir sur cette guerre une magnifique animation qui retrace les différentes péripéties entre les deux armées) Elle ne se rendit qu’après la capitulation de Barcelone en septembre 1714. Elle résista aussi vaillamment aux armées de Napoléon 1er de 1808 à 1814, une guerre dure où les exactions furent nombreuses et les différentes guerres carlistes qui constellèrent le XIXe siècle entre 1833 et 1876. 


Le cloître (en partie reconstitué)                   Porche extérieur


La forteresse perdit par la suite une grande partie de son intérêt stratégique jusqu’à ce qu’elle soit désarmée à la toute fin du XIXe siècle, puis  son église classée en 1931 et l’ensemble en 1949.
La tour maîtresse était à l’origine une tour de guet cylindrique de 25 mètres de haut. Elle a été ensuite écimée et ramenée à 12,5 mètres pour éviter qu’elle soit la cible de l’artillerie ennemie en cas de siège. 

   Détail d’un chapiteau

La couronne de remparts ceinturant l’ensemble résulte des travaux de fortification entrepris entre 1690 et 1793. Au total, 7 remparts dont 4 de forme pentagonale de quelque 4 mètres d’épaisseur, crénelés dans des terre-pleins avec bouches à feu et guérites.

Les cours d’armes
La vaste cour d’armes de la tour (25 x 15 mètres) est probablement  à l’emplacement de l’ancien château avec son réservoir souterrain qui permettait de s’assurer de l’approvisionnement en eau potable. La cour d’armes du palais permettait de distribuer les dépendances du palais des seigneurs.   

      
Les "gardiennes" des lieux
  

                                                                                                          
L’église
Consacrée dès 1040, l’église fut convertie en collégiale en 1592 et désacralisée en 1794. Côté architecture, il s’agit d’une grande basilique (51 m de long x 23,5 m de large) divisée en 3 nefs couronnées avec un transept  surmonté d’une coupole où s’ouvrent 3 absides.
Elle est considérée comme le symbole du roman catalan, mélange de roman du sud et d’influence carolingienne.
 

Son narthex, espèce de vestibule, contenait des voûtes d’arête décorées, deux fresques conservées au musée national d’art de Catalogne à Barcelone. Une action est actuellement en cours pour installer des copies de ces deux fresques à leur emplacement d’origine. 
            
Le cloître, vue générale                                     Le chevet extérieur


Il ne reste du cloître datant de la fin XIVe que quelques éléments intéressants (le reste ayant été reconstitué), dont le porche de l’étage inférieur. Son intérêt réside aussi dans la décoration sculpturale des chapiteaux basée sur les chardons, écu des seigneurs de Cardona.
L’église a 3 nefs séparées par des piliers cruciformes comprenant une nef centrale  coiffée d’une voûte renforcée par de grands arcs et deux nefs latérales avec voûtes d’arête. La grande nef centrale est éclairée par de grandes fenêtres. Sur un côté se trouve une partie de l’ancien dallage avec son niveau d’origine.

 
Les tombeaux
   
Un transept couronne cet ensemble couvert aussi d’une voûte en plein cintre et d’une coupole versant de tour lanterne. À son extrémité, on trouve les vestiges du sépulcre de Jon Ramon Folc I, deuxième comte de Cardona, marbre réalisé sur le tard en 1668.
En face, on peut voir un panthéon du XVIe siècle en albâtre du duc Ferran Ramon Folc I et de sa femme.

 
Panthéon du duc Ferran Joan Ramon Folc et sa femme
La crypte et ses voûtes en arc boutant

Son chevet (1019-1040), formé de 3 absides en demi-cercle, donne accès à une crypte  située sous l’autel principal, constituée de 3 nefs couvertes de voûtes d’arête supportées par des colonnes couronnées de chapiteaux pyramidaux.


Voir aussi
* Du même voyage : Salvador Dali à Port-Lligat --
* * Le poète Paul Eluard  -- Pablo Picasso et les femmes

* * Federico Garcia Lorca --

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