Référence : Nadine Gordimer, Beethoven avait un seizième de sang noir, nouvelles, traduction Georges Lory, éditions Grasset, 224 pages, 2009
« Gratte la peau d’un Blanc, Frederik Morris, et tu trouveras des traces du sérum de la conviction de supériorité ; l’histoire ne s’achève jamais. » (page 20)
À côté de ses écrits plus politiques où elle stigmatisait l’Apartheid, des romans comme Le Conservateur, Ceux de July ou Feu le monde bourgeois où elle décrivait l’érosion des valeurs d’une société sud-africaine en proie à la violence et à l’injustice, Nadine Gordimer parle dans ces différentes nouvelles, de l’humain, de ses grandeurs et de ses faiblesses, ses difficultés relationnelles, rejoignant par là même une certaine universalité.
Le livre est composé de dix nouvelles, la première donnant son titre à l’ensemble, Beethoven avait un seizième de sang noir, Mètre à ruban, Rêver des morts, Une femme frivole, Gregor, Mesures de sécurité, Langue maternelle, Allesverloren, Histoire, Légataire, ainsi qu’un texte intitulé "Trois dénouements possibles".
« Phénomène classique dans une enfance perturbée et jamais assumée, elle prenait sa revanche sur le monde à travers l’homme qui l’avait choisie. » (page 107)
Par quoi peut donc être conditionné le destin des êtres vivants ?
Voyez ce ver solitaire, ce "mètre à ruban", inéluctablement éliminé du tube digestif, ce cafard nommé Gregor qui meurt consumé dans une machine, son environnement naturel ou Auguste le perroquet dans "Histoire" qui abandonne son environnement familier, de nouveau déraciné, qui crie son angoisse : « Ça va ? », oh non, « ça ne va pas du tout » sorti « des profondeurs de ce qu’il a comme simili-cordes vocales ».
Avec Nelson Mandela Avec Salman Rushdie
Prenez le rôle du rêve dans "Rêver des morts", les excentricités de cette "femme frivole" que ne comprennent pas ses descendants, cette autre femme qui émigre par amour, les aléas subis par le mari de Lorrie dont l’avion est pris dans une tempête.
Prenez cette femme qui part à la recherche du passé d’un mari décédé, qui finit par rencontrer ce photographe Hayford Leiden, avec lequel il avait eu une liaison, le genre d’expérience qu’elle n’avait pas vécue. « On connait celui qu’on a connu. On ne peut pas connaître le reste, tout le reste » commente Nadine Gordimer. "Tout perdu", "Allesverloren" en afrikaans.
Prenez cette autre femme Charlotte, dans "Légataire" la dernière nouvelle, partie à la recherche de son identité, confrontée après tant d’années à cet homme, l’acteur Rendall Harris, qui pourrait être son "vrai" père, celui que sa mère Laila avait désigné dans une lettre. Mais elle sait bien que finalement « Le passé est un pays étranger. » [1]
Dans les trois derniers textes intitulés Trois dénouements possibles, elle s'inspire de Graham Green analysant la façon dont un romancier donne vie à ses personnages, à travers une narration basée sur l'utilisation des sens, en l'occurrence la vue, l'ouïe et l'odorat.
En Afrique du sud, Nadine Gordimer discerne une population « programmée depuis longtemps à ne se voir que noire ou blanche. » Pour son héroïne Zsuzsi ou Susie paraître, être vue des autres est essentiel et elle l'utilise chaque jour, ne serait-ce que dans le cadre de son métier. « Elle dépensait énormément pour s'habiller, se pomponner... »
Elle, flûtiste amatrice, lui violoncelliste professionnel... mais elle discerna, émises par son superbe violoncelle, quelques menues dissonances, assez symptomatiques pour attirer son attention, comme une signature de son infidélité.
Déjà, elle trouva curieux que leur chienne, au flair redoutable, change de comportement envers Lui. Mais, quand elle sentit au sein du lit conjugal comme une légère fragrance féminine inconnue, elle fut certaine de son infidélité.
Notes et références
[1] Citation page 70, reprise de The Go-Between de L. P. Hartley
* Voir aussi mon fichier sur son roman Feu le monde bourgeois --
<< •• Christian Broussas –Gordimer 2 - 27/07/2017 •• © cjb © •• >>
« Gratte la peau d’un Blanc, Frederik Morris, et tu trouveras des traces du sérum de la conviction de supériorité ; l’histoire ne s’achève jamais. » (page 20)
À côté de ses écrits plus politiques où elle stigmatisait l’Apartheid, des romans comme Le Conservateur, Ceux de July ou Feu le monde bourgeois où elle décrivait l’érosion des valeurs d’une société sud-africaine en proie à la violence et à l’injustice, Nadine Gordimer parle dans ces différentes nouvelles, de l’humain, de ses grandeurs et de ses faiblesses, ses difficultés relationnelles, rejoignant par là même une certaine universalité.
Le livre est composé de dix nouvelles, la première donnant son titre à l’ensemble, Beethoven avait un seizième de sang noir, Mètre à ruban, Rêver des morts, Une femme frivole, Gregor, Mesures de sécurité, Langue maternelle, Allesverloren, Histoire, Légataire, ainsi qu’un texte intitulé "Trois dénouements possibles".
« Phénomène classique dans une enfance perturbée et jamais assumée, elle prenait sa revanche sur le monde à travers l’homme qui l’avait choisie. » (page 107)
Par quoi peut donc être conditionné le destin des êtres vivants ?
Voyez ce ver solitaire, ce "mètre à ruban", inéluctablement éliminé du tube digestif, ce cafard nommé Gregor qui meurt consumé dans une machine, son environnement naturel ou Auguste le perroquet dans "Histoire" qui abandonne son environnement familier, de nouveau déraciné, qui crie son angoisse : « Ça va ? », oh non, « ça ne va pas du tout » sorti « des profondeurs de ce qu’il a comme simili-cordes vocales ».
Avec Nelson Mandela Avec Salman Rushdie
Prenez le rôle du rêve dans "Rêver des morts", les excentricités de cette "femme frivole" que ne comprennent pas ses descendants, cette autre femme qui émigre par amour, les aléas subis par le mari de Lorrie dont l’avion est pris dans une tempête.
Prenez cette femme qui part à la recherche du passé d’un mari décédé, qui finit par rencontrer ce photographe Hayford Leiden, avec lequel il avait eu une liaison, le genre d’expérience qu’elle n’avait pas vécue. « On connait celui qu’on a connu. On ne peut pas connaître le reste, tout le reste » commente Nadine Gordimer. "Tout perdu", "Allesverloren" en afrikaans.
Prenez cette autre femme Charlotte, dans "Légataire" la dernière nouvelle, partie à la recherche de son identité, confrontée après tant d’années à cet homme, l’acteur Rendall Harris, qui pourrait être son "vrai" père, celui que sa mère Laila avait désigné dans une lettre. Mais elle sait bien que finalement « Le passé est un pays étranger. » [1]
Dans les trois derniers textes intitulés Trois dénouements possibles, elle s'inspire de Graham Green analysant la façon dont un romancier donne vie à ses personnages, à travers une narration basée sur l'utilisation des sens, en l'occurrence la vue, l'ouïe et l'odorat.
En Afrique du sud, Nadine Gordimer discerne une population « programmée depuis longtemps à ne se voir que noire ou blanche. » Pour son héroïne Zsuzsi ou Susie paraître, être vue des autres est essentiel et elle l'utilise chaque jour, ne serait-ce que dans le cadre de son métier. « Elle dépensait énormément pour s'habiller, se pomponner... »
Elle, flûtiste amatrice, lui violoncelliste professionnel... mais elle discerna, émises par son superbe violoncelle, quelques menues dissonances, assez symptomatiques pour attirer son attention, comme une signature de son infidélité.
Déjà, elle trouva curieux que leur chienne, au flair redoutable, change de comportement envers Lui. Mais, quand elle sentit au sein du lit conjugal comme une légère fragrance féminine inconnue, elle fut certaine de son infidélité.
Notes et références
[1] Citation page 70, reprise de The Go-Between de L. P. Hartley
* Voir aussi mon fichier sur son roman Feu le monde bourgeois --
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