L'Avant-garde russe à Vitebsk. 1918-1922
Chagall, Lissitzky et Malevitch


« Si toute vie va inévitablement vers sa fin, nous devons durant la nôtre, la colorier avec nos couleurs d’amour et d’espoir. » Marc Chagall

                               
Exposition intéressante que consacre le Centre Pompidou à ce qu’on a appelé « l’avant-garde russe », ou École de Vitebsk entre 1918 et 1922. Elle repose sur l’œuvre de ses trois figures emblématiques que sont devenues  Marc Chagall, El Lissitzky et Kasimir Malévitch et présente aussi les travaux de participants à cette École de Vitebsk créée par Chagall : Vera Ermolaeva, Nicolaï Souietine, Ilia Tchachnik, ou encore Lazar Khidekel et David Yakerson.

                      
Chagall Combat de Jacob avec l’Ange (détail) et Le violoniste bleu

À travers un vaste ensemble de quelque deux cent cinquante œuvres et documents, cette manifestation donne un éclairage sans précédent des années qui suivent en Russie l’immédiat après-guerre, où une page importante de l’histoire picturale va s’écrire.

                               
Chagall, Autoportrait aux 7 doigts        Malévitch Suprématie 56      

Si El ou (Lazar) Lissitzky est moins connu et a largement été influencé par ses deux amis, il a composé quelques œuvres significatives de leur conception de l'art pictural, en particulier le tableau en forme d'auto portrait intitulé Le Gouverneur qui est souvent considéré comme emblématique du mouvement.  

        
Lissitzky : Le constructeur auto portrait 1924  et Design 1922

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Durant ses années à Vitebsk, Kasimir Malévitch se consacre moins à la réalisation de peintures – une exception étant son magistral Suprématisme de l’esprit – qu’à la rédaction de ses principaux écrits théoriques et à son enseignement. [1] Il est vraiment le théoricien du groupe, effaçant un peu Marc Chagall qui en prendra quelque peu ombrage. 

                      
Chagall La madone du village                     
Lissitzky  Proun 93

Il est vrai qu'à contempler les œuvres de ces trois artistes, on est frappé par la différence dans leur façon de peindre, le style coulé de Chagall qui contraste avec les formes géométriques épurées du suprématisme de Malévitch , les montages de Lissitzky avec ses fameux ensembles qu'il appela des Prouns (projets d’affirmation du nouveau en art), recherchant des « stations de liaison entre la peinture et l’architecture ».

              
Malévitch : Le bûcheron 1912       et        Filles aux fleurs 1903


Ce mouvement est né de la façon dont Chagall a vécu la Révolution d'octobre, en tout cas ce qu'il en a vu. Dans son autobiographie, Chagall écrira plus tard : « Par toute la ville, se balançaient mes bêtes multicolores, gonflées de révolution. Les ouvriers s’avançaient en chantant l’Internationale. »

                    
Marc Chagall :  Tentation et Le paradis

« À les voir sourire, j’étais certain qu’ils me comprenaient. Les chefs, les communistes, semblaient moins satisfaits. Pourquoi la vache est-elle verte et pourquoi le cheval s’envole-t-il dans le ciel, pourquoi? Quel rapport avec Marx et Lénine ? »
Sa vision de la réalité n'était visiblement pas du goût de tout le monde.

                         
Chagall :  Moi et le village        La création de l'homme

Complément : Marc Chagall, premières impressions de Paris
 « J'y découvrais la lumière, la couleur, la liberté, le soleil, la joie de vivre. C'est dès mon arrivée que j'ai enfin pu exprimer dans mon œuvre la joie plutôt lunaire que j'avais parfois connue en Russie, celle de mes souvenirs d'enfance de Vitebsk. Je n'avais jamais voulu peindre comme les autres et je rêvais d'un art qui serait nouveau et différent. »

           
Malévitch :
Carré blanc sur fond blanc  et
Fille au peigne 1932

« À Paris, j'eus enfin la vision de ce que voulais créer, l'intuition d'une nouvelle dimension psychique dans mon art. Non pas que je me cherchais un moyen d'expression, dans un style essentiellement latin comme celui d'un Courbet. Non, ma peinture n'est pas un art de self-expression, ni un art littéraire, mais quelque chose de construit, un univers de formes. »

            
Malévitch : Les sportifs     et        Suprématie en jaune & noir 1016


Notes et références
[1] Kasimir Mélévitch, De Cézanne au suprématisme, éditions L'âge d'Homme, réédition 1993 

Voir aussi
* Le néo privitismeTableaux de Chagall --


                
   Lissitzky :       Proun 19D       et                 Proun 1924
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