Annie Ernaux : Une œuvre centrée sur l’intime
Écrits fictionnels, Famille et intime, L’influence de Bourdieu
Au-delà de l’autofiction, Au temps du Nobel, Pour aller au-delà
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« Des récits ni biographies, ni romans, mais peut-être quelque chose entre la littérature, la sociologie et l'histoire. »
L'œuvre d'Annie Ernaux
est caractérisée par une transparence assumée qui tout à la fois
déconcerte et séduit par son exploration de l'intime, sa liberté
d'expérimenter et d'exposer tous les détails d'une existence.
Elle dépeint aussi un tableau lucide de la société d'après-guerre, des
modes subtils d'exclusion, de l'évolution des femmes. Son œuvre repose
sur une écriture plus exigeante qu'on ne le pense, demandant beaucoup de
rigueur.
1- L’autosociobiographie
Ses
écrits sont basés sur la description d'une période de sa vie, centrés
le plus souvent sur son milieu ou les événements qui ont marqué sa vie,
tout en incluant la dimension sociologique. D'où sa volonté d'allier
l'individuel (l'intime) au collectif (le sociologique).
Ce qu'elle appelle son approche "autosociobiographie". Elle écrira d'ailleurs à ce sujet : « Mes livres, c’est la fusion la plus étroite entre le collectif et l’individuel. »
2- Une œuvre autocentrée sur elle-même
** Sur sa jeunesse : Les armoires vides (1974), à partir de 1963
Retour à Yvetot, 1940-64 (1913/2022)
** Sur ses 15 ans : Ce qu'ils disent ou rien (1977), L'adolescence.
** Sur ses 18 ans : Mémoire de fille (2016),
** Sur son mariage (1964-81) : La femme gelée (1981)
et ses études, La honte (1997), Son expérience, ses parents la sépare de ses amis bourgeois : « Ma place d'écartelée entre deux
mondes sociaux. »
3- Une œuvre autocentrée sur sa famille
Son œuvre fictionnelle se présente ainsi :
** Sur son père : La Place (1983)
« J’écris peut-être parce qu’on n’avait plus rien à se dire. »
** Sur sa mère : Une femme (1988)/Je ne suis pas sortie de ma nuit (1997) - Connivence et déchirements
** Sur sa sœur Ginette : L'autre fille (2011)
4- Une œuvre autocentrée sur l'intime
** Sur ses rapports amoureux :
« Ce gouffre entre l'imaginaire, le désir et le réel ».
- Avec S/A : Passion simple (récit 1992) et Se perdre (2001)
- Avec W : L'occupation (1997) et Le jeune homme (2022)
** Sur son avortement : L'événement (2000)
** Sur son cancer : L'usage de la photo (2005) avec Marc Marie
** Sur la photo : De banales photos deviennent « une œuvre documentaire puissante et universelle. »
L'usage de la photo, Les Années (2008), Les années super 8 (2022)
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5- Au-delà de l’autofiction 1/2 - Les textes de Cergy
** Aucun sujet n'est tabou : « Préserver des instants qui n’ont pas vocation de rester. »
- Journal du dehors (1985-92) [1993], scènes urbaines
- La vie extérieure (1993-99) [2011] : scènes de vie du RER, des SDF, des pauvres, le Kosovo, le métro, caissières Auchan
- Regarde la lumière mon amour (2014) : les clients du Auchan de Cergy en 2012-13
** Style et "écriture plate"
Son écriture "plate", c'est les lettres à ses parents, mais recherchant la plus grande précision. (cf L’écriture comme un couteau)
« Pour
rendre compte d’une vie soumise à la nécessité, je n’ai pas le droit de
prendre d’abord le parti de l’art, ni de chercher à faire quelque chose
de “passionnant”, ou d’“émouvant. » (La place p 24)
** L'influence de Pierre Bourdieu
Entre dominés et dominants : « Cette prise de conscience, je la dois à Bourdieu. [...] Il éclaire les mécanismes de reproduction sociale. » (L’habitus )
« Avec Les Héritiers, elle découvre « quelque chose de l’ordre de la vérité ontologique. »
6- Au-delà de l’autofiction 2/2 - Les interviews
- L'écriture comme un couteau (2003-2011), Entretien avec Pierre-Yves Jeannet : sa pratique de l'écriture
- La littérature est une arme de combat (2005), Entretiens avec Isabelle Charpentier : déplacements et sociologie, "la langue de l'ennemi" (Genet), Bourdieu
- Écrire, écrire, pourquoi ? (2010) : Entretiens avec Raphaëlle Rérolle : « J’écris pour que nous n’ayons pas existé pour rien. »
- Le vrai lieu (2014), Entretiens avec Michelle Porte : Yvetot/Rouen, Cergy - Liens entre sa vie et son écriture
- La conversation (2023), Entretiens avec Rose-Marie Lagrave : trajectoire & transfuge de classe, rapport au travail, à la vieillesse
7- Au temps du Nobel, 2022
** Pour : «
Le courage et l’acuité clinique avec laquelle elle découvre les
racines, les éloignements et les contraintes collectives de la mémoire
personnelle. »
** Rééditions :
--> L'écriture comme un couteau (2003-2011)
--> L'atelier noir (2011/2022) : Journal sur ses idées, sa logique, ses doutes…
--> Rappel : [Les années super 8 (2022), Le jeune homme (2022)], La conversation (2023)
--> Hôtel Casanova
(2020) : recueil de 12 textes divers de 1984 à 2006 sur sa mère et sa
maladie (Retours), le mur de Berlin et Leipzig, des écrivains comme
Cesare Pavese et Pierre Bourdieu.
8- Pour aller plus loin...
** Essai : Un engagement d'écriture de Pierre-Louis Fort et Violaine Houdart-Merot
** Cahier de l'Herne, Annie Ernaux, Pierre-Louis Fort, mai 2022
** La rage de dire, la foi d'écrire, Le 1 hebdo, hors série, 2022
** Écrire la vie (2011), éd. Gallimard/Quarto, anthologie (onze titres plus textes de récits et de réflexions, photos) : « Écrire n'est pas pour moi un substitut de l'amour, mais quelque chose de plus que l'amour ou que la vie. »
Voir aussi :
* Annie Ernaux, Le vrai lieu -- Mémoire de fille – La place -- Les Années -- L'art d'écrire --
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