Références : Erik Orsenna, "Madame Bâ", éditions Fayard, 2002 [1]
Sacrée Madame Bâ, cette malienne incorrigible ne se sent jamais battue, comme face aux pires adversités de la vie ; et elle en connaîtra de revers et des désillusions. Cette fois, c'est son petit-fils qu'elle veut secourir mais pour cela, il faut qu'elle vient en France où, Dieu ou le marabout seul sait pourquoi, elle est "persona non grata".
Comment dans ces conditions arriver malgré tout à plaider son affaire et parvenir à passer outre au véto têtu de l'administration française. Sa demande de visa temporaire pour venir en France -formulaire n°13-0021- est de ces documents sec, aux réponses lapidaires, dont l'administration a le secret. Inutile alors de tenter de retracer la réalité si complexe de la vie de madame Bâ, d'expliquer les tenants et aboutissants d'une réponse qui ne peut être binaire car nul n'a jamais pu enfermer Marguerite Bâ dans un cadre quelconque..
Elle décide alors de s'adresser directement au
Président de la République française pour plaider son cas. Mais, pour répondre à chaque rubrique, elle en profite pour raconter peu à peu sa vie, depuis sa naissance en 1947 à Médine
au Mali à la frontière sénégalaise jusqu'à sa situation actuelle, avec l'assistance de son avocat, maître Benoît
Fabiani, qui découvre peu à peu l'Afrique.
Son grand-père surnommé Chemin des dames, est encore marqué par la Première guerre mondiale, son
père Ousmane Dyumasi, est un ingénieur en hydraulique et sa
mère Mariama, est une traditionaliste à l'aise dans les ténébreuses généalogies et l'histoire des
familles de son pays. Elle va narrer par le détail son enfance émerveillée au bord du fleuve, ses relations si tendres avec son père, cette
passion dévorante pour son si beau mari peul, qui disparaît si jeune, la laissant dans le désespoir, la laissant aussi avec huit
enfants qui auront tous la bougeotte, ce qu'elle appelle « la maladie de la boussole ».
Aux questions du formulaire, si simples en apparence, elle va répondre par ce qui pour elle traduit l'essentiel de sa vie, de son son expérience :
- Nom, prénoms, lieu de naissance : elle répond par son enfance au bord du fleuve, l'amour de ses parents, les oiseaux...
- Situation de famille : elle raconte l'éblouissement de la rencontre d'où naît la certitude d'un amour éternel;
- Enfants : avant de parler de ses huit enfants, elle évoque sa mystification, comment elle a pris la pilule pendant plusieurs années au grand désespoir de toute sa famille qui la croyait stérile.
Quinze ans après L’Exposition coloniale,
Erik Orsenna revient sur les rapports de la France avec ses colonies, en l'occurrence le Mali mais cette fois, à partir de ce pays. Il aborde la réalité de la situation par
la fable et l'humour, plongeant dans les aléas de l'histoire contemporaine, maniant allègrement ironie et indignation.
Madame Bâ, institutrice En gare de Kayes au Mali
Notes et références
[1] Erik Orsenna a publié en 2014 une suite Mali, ô Mali où Madame Bâ revient au Mali pendant la guerre du Mali de 2012-2013.
Citations
* « Nous savons trop de choses : le savoir nous cache la vérité. [...] L'eau relie donc entre eux les morceaux séparés du monde. [...] Moi aussi, j'ai compris : l'eau guérit de la solitude. [...] La parole est comme l'eau, Marguerite. Elle aussi rompt notre solitude. » (pages 105-107)
* « Quand on a été jour après jour formé pour combattre, la vie ne peut vous paraître qu'une guerre multiple et perpétuelle. » (page 375)
Voir aussi
François Busnel, "Passeur d'Afrique", L'Express, 30 avril 2003.
Francis Kpatindé, "Madame Bâ raconte l'Afrique", Jeune Afrique, 8 juillet 2003.
Voir aussi mes fiches sur Éric Orsenna
* Erik Orsenna et son oeuvre
: article de synthèse comprenant L'exposition coloniale, L'entreprise
des Indes, Voyage au pays du coton et Sur la route du papier
* Madame Bâ -- Mali ô Mali --
* L'avenir de l'eau , Princesse Histamine, La fabrique des mots
* Sur la route du papier --
* Les chevaliers du subjonctif --
<< Christian Broussas – Mme Bâ - Courmangoux, - 6 août 2014 <><> © • cjb • © >>
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