Giovanni Boldini (1842-1931), peintre mondain
1- Giovanni Boldini 2- Autoportrait
3- John Lewis Brown avec sa femme et sa fille 1890
L'appartement parisien est resté figé dans le temps. Personne n’y est entré depuis 70 ans, depuis que sa propriétaire Solange Beaugiron l’a quitté pendant la Seconde guerre mondiale pour fuir l’invasion allemande. Elle jure de ne plus y retourner tout en en assumant les frais. Dans les pièces aux vieilles boiseries s’étalent bibelots et peluche mais surtout un tableau émerge, une œuvre inconnue du peintre italien Giovanni Boldini, fort connu et prisé vers la fin du XIXe siècle.
Giovanni Boldini, Portrait de l’actrice Marthe de Florian, 1898
L’appartement de Solange Beaugiron en 2010
Avec cette découverte, voilà Boldini, qu’on avait un peu oublié, remis au goût du jour. Il fut surtout un portraitiste qui, à l’occasion de l’Exposition universelle de Paris en 1867, rencontre beaucoup d’impressionnistes et surtout Jean-Baptiste Corot.
Puis c’est Londres où il étudie les grands portraitistes comme Thomas Gainsborough et rencontre un certain succès mondain dans cette vie où il reviendra à de nombreuses reprises.
1- Portrait de Marthe Régnier 1905 2- Portrait de Betty Wertheimer 1905
3- Portrait de Marthe Bibesco 1911
Revenu à Paris, il s’installe place Pigalle et travaille avec le marchand d'art Adolphe Goupil dans un style qui rappelle Watteau ou Fragonard.
Il commence à faire le portrait du "Tout-Paris", expose au Salon, voyage en Hollande et y découvre Frans Hals, se tourne vers les pastels et en 1885 s’installe dans un atelier du boulevard Berthier dans le XVIIème arrondissement.
Boldini est surtout recherché pour ses portraits de femmes de la belle société, très élégants et remarquables par une facture à le fois hardie et fluide. En 1886, il peint le portrait de Giuseppe Verdi (actuellement à Milan) mais il en donne ensuite une autre version au pastel, le célèbre Portrait de Giuseppe Verdi à l’écharpe blanche et haut-de-forme qu’il présentera à plusieurs grandes expositions pour le léguer finalement à un musée romain.
Giuseppe Verdi 1886 Portrait de Mrs Lionel Phillips 1903
Il voyage beaucoup, en Italie bien sûr où il peint en 1892 un autoportrait pour la Galerie des Offices de Florence, à New-York 5 ans plus tard où il réalise par exemple les portraits de Cornelius Vanderbilt ou de Gertrude Whitney. C’est de retour à Paris qu’il peindra le portrait de Marthe de Florian.
Giovanni Boldini va ensuite alterner nus et natures mortes ou paysages italiens (surtout Venise et Rome) et français.
Mais à partir de 1924, sa vue s'affaiblit peu à peu et il s’éteint en 1931.
Portrait de Sem (Georges Goursat) 1901 Mlle Lantelme 1907
Le portrait du comte Robert de Montesquiou
Faire le portrait du comte Robert de Montesquiou, symbole de l'esthète de son époque, incarnation du dandy baudelairien, voilà qui devrait plaire à Boldini ! Et même opportunément puisque Montesquiou vient de faire paraître un article sur Boldoni et "le portrait moderne", intitulé "Les peintres de la femme, Boldini" (Les Modes, janvier 1901). Sa thèse est que le portrait n’est pas tant une photographie qu’un mélange de l'identité du peintre et de celle du modèle. Ce que fait justement Boldoni.
Le comte Robert de Montesquiou 1897, Orsay
Dans son tableau, Boldoni fait ressortir le dandy stylé, sa désinvolture, son élégance hautaine, son raffinement tatillon. Sa canne est tenue comme un sceptre, clin d’œil à cette désinvolture teintée de morgue qui caractérise Robert de Montesquiou.
Détails du tableau
Peut-être le peintre a-t-il voulu aussi évoquer ce vers d’un des poèmes des Chauves souris de Montesquiou, « je suis le souverain des choses transitoires », masquant ce vague à l’âme, ce malaise intime qui s’extériorise dans le non conformisme et le raffinement des apparences. Selon certains critiques, Boldoni aurait joué d’une facture puisée dans l’art du portrait des XVIe et XVIIe siècles, conjuguée à un style plus moderne pour suggérer une pointe d’ironie dans la pose étudiée du sourcilleux Robert de Montesquiou.
Bibliographie
David Downton, préface de Stéphane Rolland, Les Maîtres de l'illustration de mode, éditions Eyrolles, septembre 2011, "Giovanni Boldini" pages 24 à 31
En complément
* Mes fiches Baudelaire, une jeunesse et Un été avec Baudelaire --
Voir aussi mes fiches sur Les Arts plastiques
< • Christian Broussas –Boldoni - 01/12/2016 • © cjb © • >
1- Giovanni Boldini 2- Autoportrait
3- John Lewis Brown avec sa femme et sa fille 1890
L'appartement parisien est resté figé dans le temps. Personne n’y est entré depuis 70 ans, depuis que sa propriétaire Solange Beaugiron l’a quitté pendant la Seconde guerre mondiale pour fuir l’invasion allemande. Elle jure de ne plus y retourner tout en en assumant les frais. Dans les pièces aux vieilles boiseries s’étalent bibelots et peluche mais surtout un tableau émerge, une œuvre inconnue du peintre italien Giovanni Boldini, fort connu et prisé vers la fin du XIXe siècle.
Il représente la grand-mère de madame Beaugiron, l’actrice et courtisane qui se faisait appeler Marthe de Florian. Boldini
l’a peinte dans toute la beauté de ses 24 ans, vêtue d’une robe de
mousseline rose. On trouve aussi dans l’appartement des cartes de visite
et des lettres d’amour d’un certain Clémenceau (entre autres)…
Giovanni Boldini, Portrait de l’actrice Marthe de Florian, 1898
L’appartement de Solange Beaugiron en 2010
Avec cette découverte, voilà Boldini, qu’on avait un peu oublié, remis au goût du jour. Il fut surtout un portraitiste qui, à l’occasion de l’Exposition universelle de Paris en 1867, rencontre beaucoup d’impressionnistes et surtout Jean-Baptiste Corot.
Puis c’est Londres où il étudie les grands portraitistes comme Thomas Gainsborough et rencontre un certain succès mondain dans cette vie où il reviendra à de nombreuses reprises.
1- Portrait de Marthe Régnier 1905 2- Portrait de Betty Wertheimer 1905
3- Portrait de Marthe Bibesco 1911
Revenu à Paris, il s’installe place Pigalle et travaille avec le marchand d'art Adolphe Goupil dans un style qui rappelle Watteau ou Fragonard.
Il commence à faire le portrait du "Tout-Paris", expose au Salon, voyage en Hollande et y découvre Frans Hals, se tourne vers les pastels et en 1885 s’installe dans un atelier du boulevard Berthier dans le XVIIème arrondissement.
Boldini est surtout recherché pour ses portraits de femmes de la belle société, très élégants et remarquables par une facture à le fois hardie et fluide. En 1886, il peint le portrait de Giuseppe Verdi (actuellement à Milan) mais il en donne ensuite une autre version au pastel, le célèbre Portrait de Giuseppe Verdi à l’écharpe blanche et haut-de-forme qu’il présentera à plusieurs grandes expositions pour le léguer finalement à un musée romain.
Giuseppe Verdi 1886 Portrait de Mrs Lionel Phillips 1903
Il voyage beaucoup, en Italie bien sûr où il peint en 1892 un autoportrait pour la Galerie des Offices de Florence, à New-York 5 ans plus tard où il réalise par exemple les portraits de Cornelius Vanderbilt ou de Gertrude Whitney. C’est de retour à Paris qu’il peindra le portrait de Marthe de Florian.
Giovanni Boldini va ensuite alterner nus et natures mortes ou paysages italiens (surtout Venise et Rome) et français.
Mais à partir de 1924, sa vue s'affaiblit peu à peu et il s’éteint en 1931.
Portrait de Sem (Georges Goursat) 1901 Mlle Lantelme 1907
Le portrait du comte Robert de Montesquiou
Faire le portrait du comte Robert de Montesquiou, symbole de l'esthète de son époque, incarnation du dandy baudelairien, voilà qui devrait plaire à Boldini ! Et même opportunément puisque Montesquiou vient de faire paraître un article sur Boldoni et "le portrait moderne", intitulé "Les peintres de la femme, Boldini" (Les Modes, janvier 1901). Sa thèse est que le portrait n’est pas tant une photographie qu’un mélange de l'identité du peintre et de celle du modèle. Ce que fait justement Boldoni.
Le comte Robert de Montesquiou 1897, Orsay
Dans son tableau, Boldoni fait ressortir le dandy stylé, sa désinvolture, son élégance hautaine, son raffinement tatillon. Sa canne est tenue comme un sceptre, clin d’œil à cette désinvolture teintée de morgue qui caractérise Robert de Montesquiou.
Détails du tableau
Peut-être le peintre a-t-il voulu aussi évoquer ce vers d’un des poèmes des Chauves souris de Montesquiou, « je suis le souverain des choses transitoires », masquant ce vague à l’âme, ce malaise intime qui s’extériorise dans le non conformisme et le raffinement des apparences. Selon certains critiques, Boldoni aurait joué d’une facture puisée dans l’art du portrait des XVIe et XVIIe siècles, conjuguée à un style plus moderne pour suggérer une pointe d’ironie dans la pose étudiée du sourcilleux Robert de Montesquiou.
Bibliographie
David Downton, préface de Stéphane Rolland, Les Maîtres de l'illustration de mode, éditions Eyrolles, septembre 2011, "Giovanni Boldini" pages 24 à 31
En complément
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