dimanche 12 juillet 2020

Clément Oury, La Guerre de Succession d'Espagne

Référence : Clément Oury, La Guerre de Succession d'Espagne : La fin tragique du Grand Siècle, éditions Tallandier, 528 pages, mars 2020

           

Le 1er novembre 1700 s'éteint le roi Charles II d'Espagne, souverain d'un empire sur lequel "le soleil ne se couche jamais". A la grande surprise de l’Europe, il désigne comme héritier le jeune Philippe, duc d'Anjou, petit-fils du Roi-Soleil. Cette décision arrime le royaume d'Espagne, immense avec ses possessions américaines mais miné de l’intérieur, à celui de France, considérée comme la première puissance européenne.

 Alliance inacceptable pour les autres États d'Europe, la guerre est inévitable quand la France accepte la succession de Charles II. Et cette guerre sera une calamité pour l’Europe, la plus longue et la plus terrible épreuve du règne de Louis XIV, pour une France qui en sortira diminuée.

           
Le roi Charles II (1665-1700) et son épouse Marie-Louise d’Orléans 
Philippe V roi d’Espagne 1700-46

Il faut dire que la situation politique paraît sans issue. Louis XIV et l'empereur d'Autriche Léopold étaient petit-fils de Philippe III et avaient épousé une sœur de Charles II. Au traité de La Haye [1] en 1698, c'est l'héritier de Léopold Ier, Joseph-Ferdinand de Bavière, qui est désigné. Mais finalement en 1700, juste avant de mourir, Charles II teste en faveur de Philippe d'Anjou, petit-fils de Louis XIV...

Cette guerre de Succession d'Espagne oppose, de 1701 à 1714, les deux rois de la Maison de Bourbon à une vaste coalition dirigée par l'Angleterre, la Hollande et l'Empereur. La France dispose alors de la plus forte armée d'Europe, invaincue depuis plus d'un demi-siècle, et d'une direction stratégique unifiée. Elle va pourtant subir une série de désastres sans précédent face aux troupes alliées commandées par le duc de Marlborough et le prince Eugène de Savoie. La vaste défense de fortifications érigée par Vauban va être mise à mal et les zones frontalières largement occupées.

             
John Churchill duc de Marlborough      Marlborough à Blenheim

Les péripéties de la guerre furent nombreuses et au début calamiteuses pour les Français, en particulier à la bataille de Höchstädt-Blenheim en août 1704. A partir de 1706, le duc de Marlborough envahit la Belgique, les Français sont chassés de Madrid, les Anglais occupent Gibraltar et Minorque, contrôlant ainsi la Méditerranée. Le blocus anglais épuise un pays frappé par le froid et la famine. Louis XIV veut négocier mais les coalisés refusent.

 
Défaite française de Höchstädt-Blenheim, 1704

Mais à partir de 1708, la situation devient plus favorable à la France dont l'armée réinvestit les territoires espagnols perdus par les victoires de Brihuega et de Villaviciosa en 1710, le maréchal de Villars ayant eu une résistance exemplaire à Malplaquet l'année précédente. Et le 24 juillet 1712, Villars remporte à Denain une victoire décisive sur l'armée du prince Eugène.

   
Portrait du prince Eugène    
La victoire controversée de Malplaquet, septembre 1709 

La situation politique évolue aussi en Europe. En Angleterre, les tories [2] arrivés au pouvoir sont plutôt pour la paix, l'empereur Joseph Ier meurt en 1711 faisant de l'archiduc Charles l'héritier des Habsbourg d'Autriche.  L'Angleterre et les Pays-Bas lâchent l'Autriche, craignant de voir resurgir l'empire de Charles Quint.

Les belligérants purent trouver un compromis avec la paix d'Utrecht en avril 1713 et le traité de Rastatt l'année suivante, la guerre se terminant en fait avec la fin du siège de Barcelone en septembre 1714. Philippe V conservait son trône, perdant les possessions italiennes (Naples, la Sicile et le Milanais) et les Pays-Bas au profit de l'empereur, Gibraltar, Minorque, Terre-Neuve, la Nouvelle-Ecosse [3] et les territoires de la Baie d'Hudson revenant à l'Angleterre. Elle est le grand vainqueur de cette guerre, face à une France épuisée, diminuée qui mettra longtemps à s'en remettre.

     
Le maréchal de Villars      La victoire française de Denain du 24 juillet 1712

Clément Oury s’est attelé à décrire la conduite des différentes opérations depuis Versailles ou La Haye, aussi bien dans les stratégies élaborées dans le secret des ministres qu’au plus près des  champs de bataille. Il décrit aussi bien la condition peu enviable de simple soldat et son expérience du combat, la souffrance des populations engagées malgré elles dans les zones de conflits, les réactions du peuple selon la tournure de la guerre, voyant peu à peu l’horizon s’assombrir devant le spectre de la défaite puis reprenant espoir après la victoire de Denain, en une fin rapide de la guerre.

     
Les empereurs : Léopold 1er   Joseph 1er 1705-11   Charles VI  1711-40

Notes et références
[1] Par le traité de La Haye signé en 1698 par la France, l’Angleterre et les Provinces-Unies (les Pays-Bas), la couronne espagnole sera, à la mort de Charles II, dévolue à  Joseph-Ferdinand de Bavière, petit-fils de l’empereur Léopold 1er d’Autriche mais le traité ne sera jamais appliqué à cause de son décès prématuré en février 1699.
[2]
 Tory et Whig sont les noms des deux grands partis historiques anglais. Les tories ont été, à l'origine, les partisans des Stuarts et de l'Eglise anglicane, les whigs les défenseurs des libertés parlementaires et des dissidents protestants.

[3]
 La Nouvelle-Ecosse
est située sur la côte atlantique du Canada

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<< Chris. Broussas  Succession Espagne © CJB  ° 11/07/ 2020  >>
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