Référence : Jacques Humbert, Les Français en Savoie sous Louis XIII, Une grande entreprise oubliée, éditions Hachette, 256 pages,  1960

Afficher l'image d'origine   Afficher l'image d'origine                                                                Annecy à cette époque

Cette guerre de Savoie, eut lieu dans les années 1629-1631, essentiellement pour prévenir l’extension de l’impérialisme des Habsbourg et des impériaux. L’époque était favorable à la France, Louis XIII et Richelieu allait y participer en personne, assistés de leurs trois maréchaux De Châtillon, De Bassompierre et De Créqui, le fils de Lesdiguières qui avait déjà largement participé à une première guerre sous Henri IV.  

Les temps sont en effet favorables puisque les deux abcès de fixation avaient été résorbés : le siège de La Rochelle était terminé et les Anglais étaient repartis vaincus, les révoltes des réformés, en particulier en Languedoc,  avaient aussi été jugulées. On pourrait ajouter que Monsieur, le frère du roi en révolte contre son frère, était rentré dans le rang après sa fuite en Lorraine. [1]

Richelieu avait longuement préparé son affaire dès qu’il se douta fortement que le duc de Savoie refuserait d’être son allié. Pour cela, il fit entreprendre plusieurs actions de diversion qui eurent au moins pour avantage la prise de la forteresse de Pignerol. Autre avantage : d’après les services de renseignement du cardinal, les savoyards étaient assez favorables à l’initiative française.

Cet optimisme se confirma par la capitulation des deux villes les plus importantes Chambéry et Annecy après une brève campagne du maréchal de Châtillon. Seule la ville de Rumilly se fit un peu tirer l’oreille pour se rendre au maréchal de Bassompierre. [2] Mais surtout,  il restait encore à prendre les deux forteresses de Montmélian et dans la Maurienne, de Charbonnières à Aiguebelle. [3]



Toute la région du Léman tomba à son tour sans coup férir. L’objectif suivant était de prendre Conflans et les troupes du prince Thomas qui le gardaient, se replièrent dans la vallée de la Tarentaise jusqu’au col du Petit Saint-Bernard, poursuivies par les troupes françaises, puis dans le val d’Aoste.  À part quelques escarmouches, la campagne se déroula suivant le plan établi. Mais arriva une mauvaise nouvelle : le 24 mai, Spinola  [4] commençait le siège de la forteresse de Casal défendu par Toiras. [5] Il faut faire vite pour investir le Piémont.

Après la prise de Miolans, la Maurienne est occupée et la forteresse de Montmélian neutralisée, désormais à l'écart de la conquête et celle de Charbonnières tombe rapidement. L'armée française franchit le Mont-Cenis entre le 30 juin et le 6 juillet 1630. Dès lors le plan de campagne est clair : procéder à la jonction avec l'armée du Piémont, rejeter l'ennemi au-delà du et porter assistance aux forteresses de Pignerol [6] et de Casal. [7] Richelieu restera tout le mois de juillet à Saint-Jean de Maurienne où il dirige toutes les opérations.

François de BassompierrePortrait par Jean Alaux.       Image illustrative de l'article François de Créquy          Atelier de Jan Antonisz van Ravesteyn
Le duc de Bassompierre        François maréchal de Créquy     Gaspard de Coligny duc de Châtillon

A Veillone le 10 juillet, le duc de Montmorency qui commande les nouvelles troupes, triomphe des troupes du prince de Piémont. Mais les problèmes s'accumulent mettant pour un temps un arrêt à la progression française : la peste décime l'armée et favorise les désertions, le royaume supporte de plus en plus mal le coût de la guerre et il faudra toute la farouche volonté du Cardinal pour trouver des fonds et assurer le ravitaillement et enfin, Mantoue tombe aux mains des Impériaux, libérant des troupes ennemies. 

Mais la situation va s'améliorer avec la mort de Charles-Emmanuel remplacé par Victor-Amédée réputé être plus favorable à la France et Mazarin, jeune diplomate au service du pape, venu proposer une médiation qui permettrait au pape de jouer les arbitres. Les forces reconstituées, deux armées françaises commandées par les maréchaux de Schomberg [8] et de Marillac, [9] vont converger pour rejoindre le et secourir Casal.  

Le déploiement des forces françaises vers Casal dirigées par les trois maréchaux de La Force, de Schomberg et de Marillac fit sans doute aussi sensation que la médiation de Mazarin pour amener l'ennemi à composer et rejoindre les propositions de trêve puis de paix.  Si l'objectif initial d'octroyer Mantoue et Montferrat au duc de Nevers  fut largement atteint, la France y gagna aussi la forteresse de Pignerol et la vallée de Pérouse donnant accès à la vallée du , un droit de passage dans le duché de Savoie pour ses armées, le traité prévoyant aussi une expédition conjointe contre Gêne. La paix fut la bienvenue pour la France dont les finances étaient exsangues, Du Hallier représentant de Louis XIII ne sachant plus que faire pour nourrir et payer ses troupes d'occupation et mettre un terme au siège de Montmélian qui n'en finissait plus.     

Image illustrative de l'article Louis de Marillac                     Portrait du maréchal de Schomberg
Louis, maréchal de Marillac    Henri, maréchal de Schomberg


La guerre de succession de Mantoue (1628-31) : contexte et conséquences  

C'est un conflit périphérique qui se déroula dans le cadre plus large de la guerre de Trente Ans, opposant la France aux Habsbourg à la suite de l'extinction de la branche aînée des Gonzague en 1627. Le duc Ferdinand (1587-1626) dut laisser le cardinalat pour prendre la succession de son frère mais il mourut sans postérité en 1626 et son frère benjamin Vincent II lui succéda. Avant de décéder lui aussi l'année suivante, il avait organisé le mariage entre sa nièce Marie et le duc de Nevers Charles III

Mais l'empereur Ferdinand II marié depuis cinq ans à Eléonore de Mantoue, sœur des trois derniers ducs et donc beau-frère de Vincent II voulut rattacher le duché de Mantoue à l'Empire pour l'attribuer à la branche cadette des Gonzague de Guastalla, en l'occurrence Ferdinand de Guastalla descendant d'un frère cadet de Frédéric II de Mantoue, qui était aussi pro espagnol et pro-autrichien. La France défendit les prétentions de Charles de Nevers, voulant en profiter pour desserrer l'encerclement du royaume par les Habsbourg et leurs alliés, parmi lesquels le duc de Savoie Charles-Emmanuel Ier qui visait l'annexion du Montferrat.


Jules Mazarin, envoyé du pape Urbain VIII, s'entremet pour négocier la paix entre les deux parties, alors que les troupes du maréchal de La Force s'apprêtent à assaillir la forteresse de Casal. Le 6 avril 1631, le traité de Cherasco met fin à la guerre.

Par ce traité, l'Empereur reconnaît la possession de Mantoue et d'une partie du Montferrat par le duc de Nevers et la Savoie reçoit une partie du Montferrat. La France reçoit la place forte de Pignerol, fenêtre sur la plaine du , ce qui enchante Louis XIII qui demandera à Mazarin de le rejoindre à Paris. Il sera accueilli par Richelieu qui le prendra sous son aile et en fera son successeur auprès de Louis XIII et d'Anne d'Autriche...
 
Charles de GOnzague par du Monstier 08528.JPG   Image illustrative de l'article Charles-Emmanuel Ier de Savoie       Victor-Amédée Ier de Savoie.
Charles de Nevers     harles-Emmanuel de Savoie   Victor-Amédée Ier de Savoie


Notes et références
[1]
Chanoine Ducis, La campagne de Louis XIII en Savoie, Annecy, 1880
[2] cf les mémoires du maréchal de Bassompierre
[3] Voir l'article, Deux citadelles disparues : Charbonnières et Montmélian

[4] Spinola, plénipotentiaire et général, débarque à Gênes en septembre 1629. Mais sa santé décline rapidement et il meurt un an plus tard pendant le siège de Casal.
[5] Jean Caylar d'Anduze de Saint-Bonnet, seigneur de Toiras (1585-1636), favori de Louis XIII et maréchal de France, tué au combat près de Milan.
[6] Conquise en 1630, Pignerol et ses environs sont attribués à la France par le traité de Cherasco le 30 mai 1631. Une forteresse impressionnante y fut érigée qui servit ensuite de prison d'état et reçut des prisonniers célèbres comme Nicolas Fouque,le duc de Lauzun et le masque de fer. La ville fut reconquise par Victor-Amédée II de Savoie en 1696.
[7] Casal (aujourd'hui Casale Monferrato) est assiégée en 1628 et marque le début de la guerre de succession de Mantoue. Prise par les troupes françaises le 18 mars 1629
, elle est assiégée une seconde fois en 1630, défendue par le maréchal de Toiras.
[8] Henri de Schomberg (1575-1632) comte de Nanteuil, maréchal en 1625. A La Rochelle avec Toiras, il chasse les anglais du duc de Buckingham. En Italie, il intervient en mars 1630 au pas de Suse, prit Pignerol et se porta au secours de Casal.
[9] Louis de Marillac (1572-1632) comte de Beaumont-le-Roger, maréchal en 1629, il se distingue au siège de La Rochelle et à la reconquête de l'île de Ré puis en Italie en 1630 comme lieutenant général.


Bibliographie
* Chambéry et la Savoie --
* Chanoine Gros, Histoire de la Maurienne, 1946 - Abbé Bernard, Histoire de Montmélian, Chambéry, 1956
* Bibliothèque Nationale : Mémoires du maréchal de Châtillon (fonds français 23246) et Mémoire pour l'histoire de la conquête de duché de Savoie (fonds 7053)
* Jacques Humbert, le maréchal de Créquy gendre de Lesdiguières (573-1638), Hachette, 1962


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