Référence : Michel Onfray, Le miroir aux alouettes, Principes d’athéisme social, éditions Plon, mars 2016

  Onfray en septembre 2015
Michel Onfray, son itinéraire politique, de l’anarchisme à… de Gaulle.

« Penser l’islam en voltairien... la gauche libertaire qui est la mienne et la possibilité ici et maintenant d’une anarchie positive. »

« Autobiographie politique », annonce t-il à propos de son ouvrage. Il a en effet choisi ce moyen pour exposer ses côtés nietzschéens, proudhoniens et même gaulliens, pour mieux aider à la défense de la « cause du peuple » et montrer du doigt ceux qui l’ont trahie et fait croire au "miroir aux alouettes".

Après avoir refusé de publier en France "Penser l'islam" son essai sur l’Islam est sorti au début du mois en Italie, car sur ce sujet, selon lui « aucun débat serein n'est plus possible. » Dans une interview à BFMtv, il juge essentiel de travailler à un islam compatible avec la république et « qu'il faut faire avec huit millions de musulmans en France... »
Comme il le rappelle lui-même, les critiques à son égard ont fusé de toutes parts : « Après avoir été présenté comme islamophobe par la presse de gauche…après avoir été copieusement embrené par les mêmes comme faisant le jeu du Front national…je me suis retrouvé présenté comme un complice de l’Etat islamique ».

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Pour lui, l’esprit libertaire est essentiel, une façon « d’être et de vivre, d’être à même d’agir contre la domination, l'intolérance, le dogme, l'obsession de l'argent et du pouvoir. » Il défend le bien suprême, « la liberté, la chose du monde la moins aimée et la moins partagée », écrit-il. Au-delà de la politique puisqu’il ne croit plus ni à la droite ni à la gauche classique.
 (Capture d'écran de la couverture du livre)          
L'étoile polaire, conte d'Onfray et dessin de Mylène Farmer [1]


Il n’a pas de mots assez forts pour fustiger la gauche actuelle, lui qui reste un pacifiste convaincu et dénonce cette « gauche gouvernementale qui pense comme Giscard en économie et comme Bush I et II en politique étrangère ».

Forts de ses positions sur l'Islam, de ses références à l'ère Mitterrand, certains ont traité Onfray de « nouveau réac » mais en réalité, au-delà de ses démarches ponctuelles, il reste « avant tout un proudhonien »" [2] avec les mêmes intuitions, le même positionnement vis-à-vis de la société et les mêmes constantes quant au rejet d'un certain élitisme, la défense de la classe ouvrière, l'éducation populaire et un jugement négatif sur l'économie libérale.

« Le libéralisme est l'eau sale dans laquelle nagent naturellement la bourgeoisie d'affaires et la bourgeoisie intellectuelle. »

Onfray et Proudhon sont tous deux des philosophes autodidactes, plutôt centrés sur les problèmes français, méfiants sur l'efficacité du système démocratique par représentation, Proudhon pour qui  « l'anarchie, c'est l'ordre sans le pouvoir. » 
C'est un "proudhonien" sourcilleux, « Michel c’est un homme attaché à son pays, à sa terre, un vrai Normand, un mec qui vient de tout en bas. Quand il voit qu’on s’attaque au peuple, il ne supporte pas », dit l’un de ses ami.

Sur l'impact de son milieu sur ses prises de position, il écrit que « la biographie n’est pas tout mais elle n’est pas rien non plus», dans le Miroir aux alouettes. Poncif si l'on veut. Si Marx était un fils d’avocat, marié à une baronne avant d’«engrosser» la bonne, Proudhon était fils de tonnelier et Onfray fils d'ouvrier agricole. [3] Donc, des "fils de prolos". Onfray met en scène son histoire, en joue et en surjoue  mais « rejoint Bourdieu dans sa critique de la reproduction sociale des élites. »

       

On lui reproche aussi souvent d'abuser des médias, de la caisse de résonance qu'ils représentent pour régler des comptes mais dit un de ses amis d'Argentan « les gens se reconnaissent en lui. C'est quelqu'un d'extrêmement honnête. Cela se ressent. » A Argentan, il est "un gars du pays", va voir ses parents, on le voit  au café de Paris ou sur la place du Marché de la petite ville. Les drames qu'il a traversés contribuent aussi à construire son image : sa crise cardiaque à 28 ans puis la mort de sa compagne Marie-Claude Ruel en 2013. , n'ont pu que renforcer cette image de penseur sans apprêt. « Il est devenu une sorte de philosophe de proximité, poursuit son ami, et grâce à son travail, on lit plus de philo. »


Par un effet de retour aux sources en quelque sorte, Michel Onfray fait appel à ses souvenirs, le coiffeur de son village, son institutrice, pour retrouver ce qu'était alors une véritable "vie de gauche", basée sur la volonté de résister aux hommes, aux événements et non pour satisfaire la seule obsession de paraître.
 
Sur le plan formel, il passe pour être d'un abord plus facile, en tout cas moins rébarbatif que la plupart des philosophes estampillés comme tels. « Je définirais son style par sa capacité de concilier une langue sensible, littéraire, parfois poétique, avec un propos clair et construit », confie Gilles Haéri, directeur général de Flammarion, son éditeur précisant que « ce sont des qualités qui vont rarement de pair en philosophie ! »

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Notes et références
[1] Dans le cadre de son université du goût, Michel Onfray, a ouvert à la médiathèque de Fel, vers Argentan dans l’Orne, une exposition d’une quinzaine de dessins de la chanteuse Mylène Farmer réalisés pour illustrer un conte de Michel Onfray L’Étoile polaire paru chez Grasset.
[2] Voir Sudhir Hazareesingh, historien des idées à Oxford, auteur de Ce pays qui aime les idées, histoire d’une passion française paru chez Flammarion
[3] A propos de son père Gaston Onfray, il a écrit : « Enfant, je n'ai pas su que j'avais un père de cette qualité ; adolescent, non plus. C'est plus tard, quand on a les moyens de comparer, après avoir appris du monde et vu un peu, voire beaucoup, de la vilenie des gens, qu'on comprend qu'on avait près de soi un grand homme par ses vertus rares : modeste, doux, discret, réservé, retenu, secret, mesuré, simple, frugal, sobre, vrai. Je ne l'ai jamais entendu dire du mal de qui que ce soit, jamais juger, jamais condamner. Il n'a jamais regretté son passé ou craint le futur. Il ne s'est jamais plaint d'une vie rude de travail difficile d'ouvrier... »


  Avec ses parents

Bibliographie sommaire

La contre-histoire de la philosophie contient les textes suivants :
1-
Les Sagesses antiques, Grasset, 2006 -- 2- Le Christianisme hédoniste, Grasset, 2006 -- 3- Les Libertins baroques, Grasset, 2007
4- Les Ultras des Lumières, Grasset, 2007 -- 5- L’Eudémonisme social, Grasset, 2008 -- 6- Les Radicalités existentielles, Grasset, 2009
7- La Construction du surhomme, Grasset, 2011 -- 8- Les Freudiens hérétiques, Grasset, 2013 -- 9- Les Consciences réfractaires, Grasset, 2013

Voir aussi mes fiches sur Michel Onfray :
* Michel Onfray, Vie et oeuvre --
* Théorie du corps amoureux. Pour une érotique solaire
* L'Ordre libertaire, la vie philosophique d'Albert Camus
* Autour de Camus : Michel Onfray, Jean Daniel, BH Lévy

* Michel Onfray dans l'Orne --  La sagesse des abeilles --
* Michel Onfray, Parutions 2013 ("Le Canari du nazi", Le magnétisme des solstices, Un requiem athée, La constellation de la baleine, Les Freudiens hérétiquesLes Consciences réfractaires,-- La Raison des sortilèges. Entretiens sur la musique, Brummell. Déconstruction d’un mythe)
* L'Ordre libertaire et  Albert Camus et Michel Onfray
* Le manifeste hédoniste et Onfray, contre-histoire de la philosophie
Vidéo de Michel Onfray Onfray à LGL et Onfray dans son village --
Le point de vue Marie Kern --

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