Trente ans déjà, le 19 février 1988, que René Char (1907-1988) nous a quittés. À l’occasion du 30e anniversaire de sa mort, qui coïncide avec les 70 ans de la parution de Fureur et mystère en septembre 1948, de nombreuses manifestations ont été programmées.
L’exposition « René Char, Alberto Giacometti : une conversation souveraine »
« Tu as traversé comme une flèche sûre mes poèmes.
J’en suis très ému. »
René Char à Alberto Giacometti, 26 septembre 1965
Exposition à la Galerie Gallimard consacrée à l’auteur des Feuillets d’Hypnos.
Une exposition à deux dimensions, l’une aborde la relation entre René Char
avec son ami Alberto Giacometti, en particulier autour du Visage nuptial et de Retour Amont [1] ainsi qu’une autre centrée sur le recueil de René Char intitulé Fureur et mystère illustrée d’éditions de luxe, d’estampes et de documents originaux ou inédits.
Giacometti dans son atelier Exposition proposée par Marie-Claude Char.
Exposition René Char : L’homme qui marche dans un rayon de soleil
Cette exposition consacrée à René Char se déroule au Musée Angladon ainsi qu’à la Bibliothèque Ceccano à Avignon. [2]
Elle se donne pour but de célébrer les paysages poétiques de René Char, d'illustrer sa relation avec les éléments, et tout à la fois de révéler son œuvre au grand public. Source d'inspiration actuelle, sa poésie a largement inspiré des œuvres contemporaines comme L'Homme qui marchait dans un rayon de soleil, parue dans Les Temps modernes en 1949, devenue « L'homme qui marche dans un rayon de soleil ».
Tout dialogue entre artistes est particulièrement intéressant pour mettre en relief les interactions entre les créateurs et leurs œuvres. J'avais déjà évoqué en 2013 dans La Postérié du soleil, la connivence entre René Char et Albert Camus, en 2014 la résonance entre le poète René Char et le musicien Pierre Boulez dans un article intitulé Pierre Boulez et René Char puis en 2016, un dialogue pictural entre Picasso et Giacometti.
En voici un nouvel exemple, cette fois-ci entre René Char et Alberto Giacometti.
René Char, Alberto Giacometti
Née dans les années 30, leur amitié s’est vraiment révélée au lendemain de la Seconde guerre mondiale, évoluant en une connivence intellectuelle, ce que Char appelait dans son langage de poète, des « alliés substantiels ».
Par exemple, dans Recherche de la base et du sommet, Char consacre un texte à Giacometti qui réalise ensuite un portrait de René Char. Ils aiment échanger dédicaces, lettres et dessins. Ils même jusqu’à participer à une œuvre commune à travers deux ouvrages : le manuscrit enluminé de Le Visage nuptial et l’édition de luxe de Retour amont.
Dans Le Visage nuptial en 1963, Char utilise une écriture calligraphiée que Giacometti accompagne de sept dessins qu’il réalise simplement avec des crayons de couleur. Dans Retour amont, deux ans plus tard, le texte typographié par Guy Lévis Mano est illustré par quatre eaux-fortes.
70 ans de la parution de Fureur et mystère
Ce n’est pas seulement sa grande amitié avec René Char qui fera dire à Albert Camus : « Je tiens René Char pour notre plus grand poète vivant et Fureur et mystère pour ce que la poésie française nous a donné de plus surprenant depuis les Illuminations et Alcools. »
Ce recueil de poèmes rassemble les textes écrits par René Char depuis près d'une décennie, de Seuls demeurent et Feuillets d'Hypnos à La Fontaine narrative.
La postérité du soleil Correspondance Char-Camus
Extraits de la préface
« Ils se croisent dans les années 1930, au sein du mouvement surréaliste, signant tracts, pamphlets et participent à la publication d'ouvrages comme Violette Nozières.
Char vient de quitter son village natal de L'Isle-sur-Sorgue, en Provence, à la demande pressante de Paul Eluard, admirateur de ses premiers poèmes. Giacometti, lui, a déserté ses montagnes suisses et son village de Stampa dans le canton des Grisons pour s'installer depuis plusieurs années dans son atelier à Paris, rue Hippolite-Maindron. »
Ils prennent leurs distance avec le surréalisme, surtout par refus d'aliéner leur liberté, de s'inféoder aux canons imposés par Breton et Aragon. Fin de leur aventure surréaliste en 1934, Char quitte le mouvement en 1934 avec la publication du Marteau sans maître et Giacometti en est exclu l’année suivante.
En l’honneur de Giacometti
En avril 1964, René Char est dans le petit atelier du peintre dont les murs sont maculés de plâtre et de traces de peinture. Il assiste au combat du peintre avec son sujet, avec son modèle, une lutte qui ne cesse qu’avec le petit déclic qui libère l’artiste.
Char écrit alors son deuxième texte intitulé "Célébrer Giacometti", publié peu après dans le recueil Commune présence pendant que le peintre utilise son stylo pour dessiner le portrait de René Char qui à son tour lui dédie ce texte :
« En cette fin d'après-midi d'avril 1964 le vieil aigle despote, le maréchal-ferrant agenouillé, sous le nuage de feu de ses invectives (son travail, c'est-à-dire lui-même, il ne cessa de le fouetter d'offenses), me découvrit, à même le dallage de son atelier la figure de Caroline son modèle, le visage peint sur toile de Caroline - après combien de coups de griffes, de blessures, d’hématomes ? - fruit de passion entre tous les objets d'amour, victorieux de la mort, et aussi des parcelles lumineuses à peine séparées, de nous autres, ses témoins temporels. »
Notes et références
[1] Visage nuptial et Retour Amont, éditions Gallamard, collection "Gallimard/Poésies"
[2] Bibliothèque Ceccano et Musée Angladon, 2bis et 5 rue Laboureur Avignon
Voir aussi mes fiches :
* René Char, qui êtes-vous ? -- Ma biographie de René Char --
* La Postérié du soleil, coécrit par René Char et Albert Camus --
* Correspondance entre René Char et Albert Camus --
* Pierre Boulez et René Char -- René Char et Albert Camus --
<< Christian Broussas – René Char - 28/03/2018 <><> © • cjb • © >>
L’exposition « René Char, Alberto Giacometti : une conversation souveraine »
« Tu as traversé comme une flèche sûre mes poèmes.
J’en suis très ému. »
René Char à Alberto Giacometti, 26 septembre 1965
Exposition à la Galerie Gallimard consacrée à l’auteur des Feuillets d’Hypnos.
Une exposition à deux dimensions, l’une aborde la relation entre René Char
avec son ami Alberto Giacometti, en particulier autour du Visage nuptial et de Retour Amont [1] ainsi qu’une autre centrée sur le recueil de René Char intitulé Fureur et mystère illustrée d’éditions de luxe, d’estampes et de documents originaux ou inédits.
Giacometti dans son atelier Exposition proposée par Marie-Claude Char.
Exposition René Char : L’homme qui marche dans un rayon de soleil
Cette exposition consacrée à René Char se déroule au Musée Angladon ainsi qu’à la Bibliothèque Ceccano à Avignon. [2]
Elle se donne pour but de célébrer les paysages poétiques de René Char, d'illustrer sa relation avec les éléments, et tout à la fois de révéler son œuvre au grand public. Source d'inspiration actuelle, sa poésie a largement inspiré des œuvres contemporaines comme L'Homme qui marchait dans un rayon de soleil, parue dans Les Temps modernes en 1949, devenue « L'homme qui marche dans un rayon de soleil ».
Tout dialogue entre artistes est particulièrement intéressant pour mettre en relief les interactions entre les créateurs et leurs œuvres. J'avais déjà évoqué en 2013 dans La Postérié du soleil, la connivence entre René Char et Albert Camus, en 2014 la résonance entre le poète René Char et le musicien Pierre Boulez dans un article intitulé Pierre Boulez et René Char puis en 2016, un dialogue pictural entre Picasso et Giacometti.
En voici un nouvel exemple, cette fois-ci entre René Char et Alberto Giacometti.
René Char, Alberto Giacometti
Le Visage nuptial suivi de Retour amont
À l’occasion de cet hommage à René Char, la collection Poésie/Gallimard réédite Le Visage nuptial suivi de Retour amont de René Char, illustré par Alberto Giacometti et préfacé par Marie-Claude Char. L’édition est augmentée de deux lettres inédites d’Alberto Giacometti et René Char à propos de Retour Amont.Née dans les années 30, leur amitié s’est vraiment révélée au lendemain de la Seconde guerre mondiale, évoluant en une connivence intellectuelle, ce que Char appelait dans son langage de poète, des « alliés substantiels ».
Par exemple, dans Recherche de la base et du sommet, Char consacre un texte à Giacometti qui réalise ensuite un portrait de René Char. Ils aiment échanger dédicaces, lettres et dessins. Ils même jusqu’à participer à une œuvre commune à travers deux ouvrages : le manuscrit enluminé de Le Visage nuptial et l’édition de luxe de Retour amont.
Dans Le Visage nuptial en 1963, Char utilise une écriture calligraphiée que Giacometti accompagne de sept dessins qu’il réalise simplement avec des crayons de couleur. Dans Retour amont, deux ans plus tard, le texte typographié par Guy Lévis Mano est illustré par quatre eaux-fortes.
70 ans de la parution de Fureur et mystère
Ce n’est pas seulement sa grande amitié avec René Char qui fera dire à Albert Camus : « Je tiens René Char pour notre plus grand poète vivant et Fureur et mystère pour ce que la poésie française nous a donné de plus surprenant depuis les Illuminations et Alcools. »
Ce recueil de poèmes rassemble les textes écrits par René Char depuis près d'une décennie, de Seuls demeurent et Feuillets d'Hypnos à La Fontaine narrative.
La postérité du soleil Correspondance Char-Camus
Extraits de la préface
« Ils se croisent dans les années 1930, au sein du mouvement surréaliste, signant tracts, pamphlets et participent à la publication d'ouvrages comme Violette Nozières.
Char vient de quitter son village natal de L'Isle-sur-Sorgue, en Provence, à la demande pressante de Paul Eluard, admirateur de ses premiers poèmes. Giacometti, lui, a déserté ses montagnes suisses et son village de Stampa dans le canton des Grisons pour s'installer depuis plusieurs années dans son atelier à Paris, rue Hippolite-Maindron. »
Ils prennent leurs distance avec le surréalisme, surtout par refus d'aliéner leur liberté, de s'inféoder aux canons imposés par Breton et Aragon. Fin de leur aventure surréaliste en 1934, Char quitte le mouvement en 1934 avec la publication du Marteau sans maître et Giacometti en est exclu l’année suivante.
En l’honneur de Giacometti
En avril 1964, René Char est dans le petit atelier du peintre dont les murs sont maculés de plâtre et de traces de peinture. Il assiste au combat du peintre avec son sujet, avec son modèle, une lutte qui ne cesse qu’avec le petit déclic qui libère l’artiste.
Char écrit alors son deuxième texte intitulé "Célébrer Giacometti", publié peu après dans le recueil Commune présence pendant que le peintre utilise son stylo pour dessiner le portrait de René Char qui à son tour lui dédie ce texte :
« En cette fin d'après-midi d'avril 1964 le vieil aigle despote, le maréchal-ferrant agenouillé, sous le nuage de feu de ses invectives (son travail, c'est-à-dire lui-même, il ne cessa de le fouetter d'offenses), me découvrit, à même le dallage de son atelier la figure de Caroline son modèle, le visage peint sur toile de Caroline - après combien de coups de griffes, de blessures, d’hématomes ? - fruit de passion entre tous les objets d'amour, victorieux de la mort, et aussi des parcelles lumineuses à peine séparées, de nous autres, ses témoins temporels. »
Notes et références
[1] Visage nuptial et Retour Amont, éditions Gallamard, collection "Gallimard/Poésies"
[2] Bibliothèque Ceccano et Musée Angladon, 2bis et 5 rue Laboureur Avignon
Voir aussi mes fiches :
* René Char, qui êtes-vous ? -- Ma biographie de René Char --
* La Postérié du soleil, coécrit par René Char et Albert Camus --
* Correspondance entre René Char et Albert Camus --
* Pierre Boulez et René Char -- René Char et Albert Camus --
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