Référence : Jean-Louis Fournier, Dis, où on va papa ?, éditions Stock et Livre de poche, août 2008, Prix Fémina 2008
Dis, où on va Jean-Louis ?
Voilà un livre poignant et beau à la fois. L'histoire pourtant ne prête pas à rire : père de trois enfants, Jean-Louis Fournier raconte sous la forme de petites saynètes, la vie de deux de ses enfants handicapés. C'est assez drôle comme seuls peuvent l'être ceux qui ont vécu un tel malheur sans tomber dans le pathos.
« Où on va papa? », répète inlassablement Thomas tandis que son frère Mathieu joue avec un ballon, seul objet de contact entre lui et ses proches. En fait, seule une bonne dose d'humour peut lui permettre de supporter une réalité privée d'avenir. Rien de cruel dans ses propos, seulement une tendresse infinie qui sourd de son récit.
« Si un enfant qui naît, c'est un miracle, un enfant handicapé, c'est un miracle à l'envers », écrit-il quand sous le jeu de mot filtre quand même un pincement de cœur. A Josée, la femme qui aida le père dans la difficile gestion quotidienne de Thomas et Mathieu, il balance l'air de rien : « Pourquoi, Josée, avez-vous jeté les enfants par la fenêtre ? » La pauvre se demande ce qui lui arrive et devant son regard interloqué, il ajoute, « Ce n'est pas ben, Josée, ce que vous avez fait. Je sais bien qu'ils sont handicapés, ce n'est pas une raison pour les jeter. »
De la paille dans la tête, une ventouse par dessus, du chagrin aussi avec ces enfants pas comme les autres, « comme Einstein, Mozart, Michel-Ange. » Allons donc ! Allez savoir, ils auraient peut-être viré délinquants, auraient bricolé le pot d'échappement de leur scooter pour faire plus sportif, auraient fini chômeurs, ou pire auraient aimé Jean-Michel Jarre, se seraient mariés à une conne, auraient divorcé, eu des enfants... handicapés. « On l'a échappé belle" ! »
Notes et références
[1] Comme dans cet exemple :
« Cher Mathieu, cher Thomas,
Quand vous étiez petits, j’ai eu quelquefois la tentation, à Noël, de vous offrir un livre, un Tintin par exemple. On aurait pu en parler ensemble après. Je connais bien Tintin, je les ai lus tous plusieurs fois.
Je ne l’ai jamais fait. Ce n’était pas la peine, vous ne saviez pas lire. Vous ne saurez jamais lire. Jusqu’à la fin, vos cadeaux de Noël seront des cubes ou des petites voitures… »
Voilà un livre poignant et beau à la fois. L'histoire pourtant ne prête pas à rire : père de trois enfants, Jean-Louis Fournier raconte sous la forme de petites saynètes, la vie de deux de ses enfants handicapés. C'est assez drôle comme seuls peuvent l'être ceux qui ont vécu un tel malheur sans tomber dans le pathos.
Jean-Louis Fournier écrit une longue lettre sans destinataires car ceux-ci ne pourront pas de toute façon lire ces mots et savoir ce qu'ils signifient. [1] Il nous donne une belle leçon de vie mâtinée de graines d'humour assez caustique qui n'appartiennent qu'à lui. Hors de tout mélo, avec des phrases décochées comme des flèches, il nous dérange, bouscule les préjugés qu'on peut avoir face au handicap et la manière de s'y confronter.
« Où on va papa? », répète inlassablement Thomas tandis que son frère Mathieu joue avec un ballon, seul objet de contact entre lui et ses proches. En fait, seule une bonne dose d'humour peut lui permettre de supporter une réalité privée d'avenir. Rien de cruel dans ses propos, seulement une tendresse infinie qui sourd de son récit.
« Si un enfant qui naît, c'est un miracle, un enfant handicapé, c'est un miracle à l'envers », écrit-il quand sous le jeu de mot filtre quand même un pincement de cœur. A Josée, la femme qui aida le père dans la difficile gestion quotidienne de Thomas et Mathieu, il balance l'air de rien : « Pourquoi, Josée, avez-vous jeté les enfants par la fenêtre ? » La pauvre se demande ce qui lui arrive et devant son regard interloqué, il ajoute, « Ce n'est pas ben, Josée, ce que vous avez fait. Je sais bien qu'ils sont handicapés, ce n'est pas une raison pour les jeter. »
De la paille dans la tête, une ventouse par dessus, du chagrin aussi avec ces enfants pas comme les autres, « comme Einstein, Mozart, Michel-Ange. » Allons donc ! Allez savoir, ils auraient peut-être viré délinquants, auraient bricolé le pot d'échappement de leur scooter pour faire plus sportif, auraient fini chômeurs, ou pire auraient aimé Jean-Michel Jarre, se seraient mariés à une conne, auraient divorcé, eu des enfants... handicapés. « On l'a échappé belle" ! »
Notes et références
[1] Comme dans cet exemple :
« Cher Mathieu, cher Thomas,
Quand vous étiez petits, j’ai eu quelquefois la tentation, à Noël, de vous offrir un livre, un Tintin par exemple. On aurait pu en parler ensemble après. Je connais bien Tintin, je les ai lus tous plusieurs fois.
Je ne l’ai jamais fait. Ce n’était pas la peine, vous ne saviez pas lire. Vous ne saurez jamais lire. Jusqu’à la fin, vos cadeaux de Noël seront des cubes ou des petites voitures… »
Voir aussi
* Clara Dupond-Monod, S'adapter --
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<< Christian Broussas, Fournier - 10/06/2024 © • cjb • © >>
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