REMORDS I

« Si tes remords sont vrais, ton coeur n'est plus coupable. »
Voltaire

Comme un simple écrit sur la neige
Qui se décline en maints arpèges,
Comme sur le sable une empreinte
Qui se dilue, semble hors d’atteinte,
Tout, un jour ou l’autre, s’efface
Sans rémission, quoi qu’on fasse.
 
C'est une page qui, bien malgré moi, se tourne,
Vole, vole au vent belle page
Pleine de joies, pleine d'images,
Et ma tête aussi tourne, tourne,
Pauvre feuille morte qui monte
Dans les cieux et tournoie, emportant ma honte.

Laissez-moi donc mes souvenirs,
Laissez-moi à mes las soupirs, 
Ils ne sont que mélancolie
Face aux liens qui nous ont unis
Puis peu à peu se sont défaits,
Quelque sentiment que j’en ai.

Je me sens ainsi si peu de chose, si peu,
Dusse me peser cet aveu, 
Pris par cette réalité
Qui entrave ma liberté
Dans ces moments si douloureux,
Qui peuvent paraître si peu, vraiment si peu…

Aussi loin que je m’y hasarde,
Sans que j’y prenne vraiment garde,
J’ai cru que la maison, ce toit,
Faisait vraiment partie de moi  
Mais non, le temps défait les vies,
les espoirs... et tout est fini.
 
L’esprit se met à rêver et il plane, plane
Puis tout se dissout et se fane,
Rien ne peut arrêter le vent
Et rien ne sera comme avant.
Comment alors vraiment admettre,
Faire semblant et continuer à paraître ?

On ne revient pas en arrière,
Si j’y consens, je vois mon père,
Son œil exercé de maçon,
Sa truelle et son fil à plomb,
J’y vois le passé qui me presse,
La situation qui me stresse.

Alors petit à petit, les choses se font
Puis sans préavis se défont
Avec le temps et avec l’âge,
Ainsi se tourne chaque page,
Palimpseste d’une mémoire
Détentrice de tant de bonheurs et d’histoires.
 
À contempler ces belles pierres
Et leur histoire centenaire,
Savais-je bien que l’éphémère
Était le lot de cette terre ?

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<< Ch. Broussas, Remords I 13/11/2019 © • cjb • © >>
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