Référence : Michel Onfray Grandeur du petit peuple, éditions Albin Michel, 384 pages, janvier 2020
Tiens donc, voilà un intello qui défend le mouvement des gilets jaunes sans restriction, un peu seul dans le cénacle des penseurs de notre époque.
Certains ont parlé à leur propos de jacquerie comme ces révoltes qui éclataient soudain, ravageaient tout sur leur passage comme un ouragan et s’éteignaient autant sous les coups du pouvoir que de leur absence de véritables objectifs.
Si la révolte des bonnets rouges n’a guère été qu’un feu de paille, réaction épidermique aux prétentions du pouvoir, celle des gilets jaunes fut d’une autre nature. Face à une classe politique qui ne représente plus qu’elle-même, ils se sont érigés en alternative à la pratique actuelle qui crée une césure entre ceux qui exercent le pouvoir et ceux sur lesquels il s’exerce, ce que Michel Onfray appelle le peuple et l’élite.
Position binaire si l’on veut, qui s’appuie sur l’image de la barricade, de deux camps qui s’affrontent, l’un représentant le peuple et l’autre les forces répressives à la solde de l’élite au pouvoir. Et de prendre franchement parti : « Je ne crains pas de dire que j'ai choisi le camp du peuple contre le camp de ceux qui l'étranglent. »
Il rappelle cette belle phrase de La Boétie, le pote à Montaigne : «Soyez résolus de ne plus servir et vous voilà libres ! », qui doit devenir le crédo d’une gauche vraiment populaire.
Voici, avec son style inimitable, ce qu’il en dit :
Pour salir et discréditer le mouvement des gilets-jaunes, « le pouvoir a utilisé les moyens les plus déloyaux, mépris, mensonge, déconsidération… mais aussi leur a fait un procès en immaturité, « trop bêtes, trop provinciaux, trop incultes, trop illettrés, trop débiles, trop "beaufs", trop sous-diplômés, presque "affreux, sales et méchants". »
Les dominants, depuis Maastricht en 1992, « discréditent quiconque ne souscrit pas à l'Europe libérale », ceux qui récusent le rôle moteur de l’Union européenne dans le libéralisme économique et la marche à la mondialisation.
« Le système maastrichtien a son clergé, énarques, polytechniciens, futurs dirigeants des grands corps formés dans le moule de l’idéologie libérale » qu’ils régurgitent par la suite. [1]
Il n’a nulle confiance en ce clergé comme il dit, qui pervertit le cœur du système : « Comme les sophistes grecs, cette caste peut soutenir n'importe quelle cause parce que leur formation met le paquet sur la forme, rien que la forme, tout sur la forme, et qu'elle se contente pour tout fond de l'idéologie dominante. Ces gros cerveaux de compétition sont ceux de petits perroquets. »
Onfray et Marcel Gauchet Onfray avec sa femme Dorothée
Michel Onfray pose le problème des rapports entre la démocratie représentative et la démocratie directe, la propention de la première à remettre en cause les valeurs de la seconde comme on a pu le constater avec la Constitution européenne "repêchée" après l'échec du "oui" au référendum ou l'abandon du nouvel aéroport de Nantes sans tenir compte du référendum local qui avait pourtant voté en faveur du projet à une large majorité.
Michel Onfray devant l’église St-Étienne le Vieux de Caen en 2016
Il reproche aussi au système de très mal représenter les plus défavorisés comme les Gilets jaunes en réduisant par exemple le référendum à la portion congrue ou en ayant la haute main sur le découpage électoral.
En fait, le pouvoir a peur de la démocratie directe. Pour lui, rien ne vaut de se frotter au terrain, on y apprend beaucoup de choses. La première revendication des Gilets jaunes par exemple, que l'on peut lire dans un document-tract concerne justement ce thème : « Nous voulons de la démocratie directe à tous les niveaux... »
Ce tract qui résume les revendications des Gilets jaunes est plus que ça, les grandes lignes d'un programme, « la feuille de route de la démocratie directe. » [2]
Notes et références
[1] Grands corps d’État, et aussi selon Onfray, « haute administration, université, journalisme, édition, direction des médias, conseil d'État, sans oublier la politique politicienne qui est le prolétariat de ces gens-là. »
[2] Huit points ressortent de ce cahier de doléances :
1- Rétablissement de l’ISF
2- Taxer le carburant avions et bateaux comme les voitures et baisser la taxe TICPE sur l’énergie domestique
3- Hausse des salaires et SMIC à 1600 € net
4- Supprimer la CSG sur les retraites
5- Aucune retraite en-dessous de 1400 € net
6- La Sécurité sociale à 100% et pour tous
7- Abroger le CICE qui sert surtout aux grandes entreprises
8- Taxer les grandes fortunes pour financer la transition écologique.
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<< Christian Broussas, Onfray Peuple 11/01/2020 © • cjb • © >>
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Tiens donc, voilà un intello qui défend le mouvement des gilets jaunes sans restriction, un peu seul dans le cénacle des penseurs de notre époque.
Certains ont parlé à leur propos de jacquerie comme ces révoltes qui éclataient soudain, ravageaient tout sur leur passage comme un ouragan et s’éteignaient autant sous les coups du pouvoir que de leur absence de véritables objectifs.
Si la révolte des bonnets rouges n’a guère été qu’un feu de paille, réaction épidermique aux prétentions du pouvoir, celle des gilets jaunes fut d’une autre nature. Face à une classe politique qui ne représente plus qu’elle-même, ils se sont érigés en alternative à la pratique actuelle qui crée une césure entre ceux qui exercent le pouvoir et ceux sur lesquels il s’exerce, ce que Michel Onfray appelle le peuple et l’élite.
Position binaire si l’on veut, qui s’appuie sur l’image de la barricade, de deux camps qui s’affrontent, l’un représentant le peuple et l’autre les forces répressives à la solde de l’élite au pouvoir. Et de prendre franchement parti : « Je ne crains pas de dire que j'ai choisi le camp du peuple contre le camp de ceux qui l'étranglent. »
Il rappelle cette belle phrase de La Boétie, le pote à Montaigne : «Soyez résolus de ne plus servir et vous voilà libres ! », qui doit devenir le crédo d’une gauche vraiment populaire.
Voici, avec son style inimitable, ce qu’il en dit :
Pour salir et discréditer le mouvement des gilets-jaunes, « le pouvoir a utilisé les moyens les plus déloyaux, mépris, mensonge, déconsidération… mais aussi leur a fait un procès en immaturité, « trop bêtes, trop provinciaux, trop incultes, trop illettrés, trop débiles, trop "beaufs", trop sous-diplômés, presque "affreux, sales et méchants". »
Les dominants, depuis Maastricht en 1992, « discréditent quiconque ne souscrit pas à l'Europe libérale », ceux qui récusent le rôle moteur de l’Union européenne dans le libéralisme économique et la marche à la mondialisation.
« Le système maastrichtien a son clergé, énarques, polytechniciens, futurs dirigeants des grands corps formés dans le moule de l’idéologie libérale » qu’ils régurgitent par la suite. [1]
Il n’a nulle confiance en ce clergé comme il dit, qui pervertit le cœur du système : « Comme les sophistes grecs, cette caste peut soutenir n'importe quelle cause parce que leur formation met le paquet sur la forme, rien que la forme, tout sur la forme, et qu'elle se contente pour tout fond de l'idéologie dominante. Ces gros cerveaux de compétition sont ceux de petits perroquets. »
Onfray et Marcel Gauchet Onfray avec sa femme Dorothée
Michel Onfray pose le problème des rapports entre la démocratie représentative et la démocratie directe, la propention de la première à remettre en cause les valeurs de la seconde comme on a pu le constater avec la Constitution européenne "repêchée" après l'échec du "oui" au référendum ou l'abandon du nouvel aéroport de Nantes sans tenir compte du référendum local qui avait pourtant voté en faveur du projet à une large majorité.
Michel Onfray devant l’église St-Étienne le Vieux de Caen en 2016
Il reproche aussi au système de très mal représenter les plus défavorisés comme les Gilets jaunes en réduisant par exemple le référendum à la portion congrue ou en ayant la haute main sur le découpage électoral.
En fait, le pouvoir a peur de la démocratie directe. Pour lui, rien ne vaut de se frotter au terrain, on y apprend beaucoup de choses. La première revendication des Gilets jaunes par exemple, que l'on peut lire dans un document-tract concerne justement ce thème : « Nous voulons de la démocratie directe à tous les niveaux... »
Ce tract qui résume les revendications des Gilets jaunes est plus que ça, les grandes lignes d'un programme, « la feuille de route de la démocratie directe. » [2]
Notes et références
[1] Grands corps d’État, et aussi selon Onfray, « haute administration, université, journalisme, édition, direction des médias, conseil d'État, sans oublier la politique politicienne qui est le prolétariat de ces gens-là. »
[2] Huit points ressortent de ce cahier de doléances :
1- Rétablissement de l’ISF
2- Taxer le carburant avions et bateaux comme les voitures et baisser la taxe TICPE sur l’énergie domestique
3- Hausse des salaires et SMIC à 1600 € net
4- Supprimer la CSG sur les retraites
5- Aucune retraite en-dessous de 1400 € net
6- La Sécurité sociale à 100% et pour tous
7- Abroger le CICE qui sert surtout aux grandes entreprises
8- Taxer les grandes fortunes pour financer la transition écologique.
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