mercredi 10 février 2021

Tahar ben Jelloun L'amertume et le miel

 Référence : Tahar ben Jelloun, L'amertume et le miel, éditions Gallimard, collection Blanche, 256 pages, janvier 2021

          

Le roman se passe à Tanger au début des années 2000. Tahar ben Jelloun connaît bien Tanger pour y avoir vécu et l’a utilisé à plusieurs reprises dans son œuvre. On retrouve Tanger dans ses premiers textes, au centre de « Tanger-la-trahison », sorte de poème-récit publié en 1973 [1], dans « Tanger porte de l’Afrique » [2] publié en 1976. Il faut aussi citer ses romans dont l’intrigue se passe essentiellement à Tanger, « Jour de silence à Tanger », publié en 1991, Le dernier ami publié en 2005 et « Partir » publié en 2007.

Si donc l’histoire se passe à Tanger au début des années 2000, cette histoire aurait pu se passer aujourd’hui, la situation ayant peu évolué. Tahar ben Jelloun est parti d’une histoire vraie, il a enquêté , rencontré des témoins de l’époque et retrouvé des numéros de sa gazette.

      

Histoire poignante que celle de Samia, cette adolescente dupée par un type, avec le khenzir, un homme élégant qui dirige une revue de poésie, qui par un subterfuge –lui faire miroiter la publication de ses poèmes- va impunément abuser d’elle. Après sa disparition, ses parents Mourad et Malika vont découvrir son journal intime qui leur dévoilera tout ce qu’elle a pu subir. Progressivement, ils s’enfonceront dans une dépression qui aurait pu leur être fatale. Maintenant, ils en sont réduits à vivre dans le sous-sol de leur maison.

 
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Mais après cette amertume suprême, ils vont peu à peu remonter la pente, goûter de nouveau à ce goût de miel qui fait aimer la vie. Cette mutation, ils la doivent à un jeune immigré africain, Viad qui va devenir leur sauveur. Avec bienveillance, il leur met assez de baume au cœur pour l’espoir et l’avenir soient plus forts que le désespoir.

C'est un roman qui se déroule entre passé et présent, entre drames intimes et manoeuvres, corruptions, entre culture maghrébine et culture française, évoluant dans des situations où tout le monde en ressortira différent.

         

Il y critique aussi l'état de la société marocaine encore marquée par une corruption largement évoquée dans le livre, la questions récurrente des mariages arrangés, la promiscuité qui sévit encore... Samia espérait que les mots magiques de la poésie réussiraient à exorciser la médiocrité de la société marocaine qu'elle ressentait si fortement. Elle supportait difficilement la pauvreté qui s'étalait dans la ville, les mendiants pitoyables, les enfants laissés à eux-mêmes, l'injustice à chaque coin de rue avant qu'un pédophile ne vienne lui ravir ses dernières lueurs d'espoir.

           
Œuvres picturales de Tahar ben Jelloun

Dans un entretien, Tahar ben Jelloun dit qu'une « société qui ne protège pas l’enfance est coupable. » Il dénonce l’impunité des pédocriminels dans la société marocaine des années 2000.
Il ajoute qu'il espère que son livre sera le point de départ d'un débat pour que le pays protège mieux les enfants.

         

Notes et références
[1] Inclus dans le recueil Harrouda.
[2] Inclus dans le recueil  Les amandiers sont morts de leurs blessures.

Voir aussi
* Tahar ben Jelloun : L'enfant de sable - La nuit sacrée, prix Goncourt 1987 -
* Tahar ben Jelloun : L'insomnie -- La punition --

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