Référence : Marie-Hélène Lafon, Les sources, éditions Buchet-Chastel, 128 pages, 2023
« Quand j'écris, je rejoins mon vrai pays, c'est très intestin, très organique, comme malaxer la viande. »
Après l'obstention du prix Renaudot en 2020 pour son roman Histoire du fils,
qui a obtenu un beau succès, elle publie ce court roman où elle revient
sur les fondements (les sources) et les thèmes essentiels de son
oeuvre.
Une ferme isolée dans le Cantal, dans la vallée de la Santoire,
une famille composée d'un couple et de leurs trois enfants. Une
histoire intime qui va peu à peu se dévoiler autour du rôle essentiel
d'un homme violent. Voilà pour le décor et le fil conducteur.
Marie-Hélène Lafon
revient une nouvelle fois sur ses sources à elle, dans ce déparement où
elle est née et a passé son enfance et sa jeunesse et où elle a placé
beaucoup de ses romans précédents.
Elle, la trentaine, est une mère de famille rangée. Ce jour de juin 1967, la maison doit être impeccable car c'est jour de "grande toilette des enfants", comme elle dit, être prête pour aller le lendemain chez les grands-parents.
Elle repense à à son passé, son enfance, au présent. Huit ans de mariage, un corps plus lourd, trois enfants, Isabelle, Claire et Gilles... Une vie en apparence réglée et heureuse. La réalité est beaucoup moins reluisante avec cet homme qui la terrorise.
C'est ce qu'on appelle "la violence au quotidien", le silence et l'isolement dans ce lieu retiré de cette région rurale, quand il faut donner le change. Marie-Hélène Lafon
a structuré son récit en trois mouvements, autour de la ferme
familiale. La mère d'abord et cette lassitude constante, le père dont on
tente de saisir le comportement, qui rumine dans une maison désormais
vide, qui ne comprend pas les évolutions majeures de la vie d'un couple.
« J'avais l'orgueil et j'avais la rage. » Marie-Hélène Lafon
Il repense à ses filles qui semblent bien s'en tirer, à sa tante Jeanne,
professeure de mathématiques dont il est fier, à son fils aussi qui lui
fait souci, dont il se demande ce qu'il va devenir, guère capable selon
lui de « tenir une ferme. »
Le troisième mouvement est consacré à la fille puînée Claire,
une adulte cinquante ans plus tard à l'automne 2021. Sous le poids de
ce passé, elle est revenue devant la maison de son enfance qui vient
d'être vendue et qui lui rappelle le temps des mauvais souvenirs et des
visites alternées.
« Ça passe vite, la vie, le temps »
Roman
court dit-on mais style concis, précis, décrivant un climat alourdi par
le comportement du mari qui instaure dans la famille une véritable
terreur chacun devant se tenir sur ses gardes, toujours sur le qui-vive.
Marie-Hélène Lafon décrit ensuite le ressenti du père, le fait qu'il n'admet pas le fait qu'aucun de ses enfants ne reprendra sa ferme, « qu'il n'aura pas de suite. »
La dernière partie est plus apaisée, « Claire respire dans la cour l'odeur tiède et sucrée des feuilles alanguies. » Elle
retrouve comme elle les avait laissés, la cour, l'érable, la balançoire
mais elle reste plantée sur le seuil de la maison, la contemplant comme
pour lui dire adieu.
Voir aussi
* Histoire du fils -- Flâneries -- Joseph -- Nos vies --
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<< Christian Broussas •• MHL Les sources •• © CJB °°° 08/09/2023 >>
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