« Le ciel est joli comme un ange. » Arthur Rimbaud
1842, cathédrale Saint-Julien du Mans dans la Sarthe.
Un architecte qui travaille dans la chapelle s'aperçoit que quelques
traces de couleur apparaissent dans les voûtes. Il distingue de
minuscules taches qui l'intriguent, derrière l'enduit blanc. Il
s'approche, gratte légèrement l'enduit qui dévoile progressivement... un
ange. Puis à mesure qu'on gratte, la voûte révèle d'autres merveilles,
tout un orchestre de quarante-deux anges musiciens, peints vers 1370 comme va l'estimer la datation.
Ce sommet de la peinture gothique occidentale peut être à rapprocher de la célèbre tapisserie de "l'Apocalypse" d'Angers, de la même époque et de style assez proche. Elle est l'œuvre d'un peintre anonyme de la Cour des rois Charles V et Charles VI. 
L'ange aux ailes déployées
D'autres surprises les attendent. Si, certains des instruments représentés sont plutôt courants au Moyen Âge, tels flûtes et tambourins, d’autres ont manifestement disparus. En particulier, l'un des anges porte… un échiquier, en fait une caisse carrée décorée en damiers qui était un instrument de musique. 
Détail de la voûte
Il
connut un beau succès au 14e siècle, comme en témoignent plusieurs
manuscrits de l'époque. Pour en jouer, il fallait appuyer sur des
touches situées sur un des côtés de la boîte, touches reliées à des
cordes placées dans la caisse. Unique au monde, l'ensemble peint du Mans est quasiment la seule représentation connue de cet instrument de musique aujourd'hui disparu.
Le plafond peint, vue générale
Certains anges tiennent des parchemins où l’on peut déchiffrer des extraits de chants qui contiennent des neumes, qu'on peut considérer comme les ancêtres des notes de musique. Mais on ne sait pas que chantent les anges…
De plus, on a retrouvé certains de ces morceaux de chants dans des manuscrits médiévaux écrits au Mans, ce qui prouve qu'ils étaient bien joués dans la cathédrale. Quelques-uns d'entre eux, comme le Salve Regina, sont encore chantés de nos jours.
L'ange à la lyre L'ange à la mandoline
Quelques
180 ans après la "résurrection" des anges, un vidéo spectacle a été
créé et projeté périodiquement sur la façade de la cathédrale,
restituant ainsi dans leur environnement les anges musiciens jouant des
divers instruments en vogue à l'époque, harpe, cymbales ou cornemuse… et
bien sûr le fameux échiquier.
Lors de cette "Nuit des Chimères", les
anges s'échappent des voûtes de la chapelle de la Vierge et donnent un
concert céleste sur le portail roman de la cathédrale. 
L'ange lisant L'ange jouant de l'échiquier