dimanche 13 septembre 2015

Claire Auzias La grève des ovalistes

Claire Auzias en 2011

Toute jeune, Claire Auzias, après avoir participé à la fondation du Comité d'action lycéen CAL 69 puis aux événements de Mai 1968 à Lyon au sein du Mouvement du 22 mars créé par des groupes libertaires, s'engage dans le mouvement féministe.

En 1980, elle soutient une thèse de doctorat en histoire à l'université Lyon-II sur La mémoire orale des mouvements libertaires à Lyon avant la  Seconde guerre mondiale puis travaille sur ses deux thèmes favoris qui sont l'anarchisme [1] et les roms. [2]

Elle se définit elle-même comme une anarchiste individuelle, attirée aussi par le courant anarcho-syndicaliste qui l'amènera à écrire l'histoire d'une grève de jeunes femme à Lyon, "La grève des ovalistes".
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Référence : Claire Auzias, "La Grève des ovalistes. Lyon, juin-juillet 1869", Paris 1982, éditions Payot, collection : « Le Regard de l'histoire », Isbn 2-228-27400-3

Au temps où Lyon était la capitale de la soie, les ovalistes [3] étaient des ouvrières de la soie qui appliquaient des traitements préparatoires au fil de soie grège après la phase de filature, [4] pour qu'il devienne utilisable pour le tissage. Ces ouvrières étaient de jeunes femmes recrutées dans les campagnes environnantes de Lyon, mal payées [5] et mal logées dans des chambres le plus souvent insalubres et surpeuplées. Conditions de travail et conditions de vie étaient ainsi très difficiles pour ces jeunes femmes arrachées à leur campagne.

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Pendant l'été de l'année 1869, 250 ouvrières « ovalistes » se mirent en grève pour réclamer une augmentation de leur salaire et une diminution de leur temps de travail. La veille du mouvement, elles signent toutes une pétition pour réclamer deux francs par jour et la journée de 11 heures. Elles demandent l'aide du préfet pour faire aboutir leurs revendications mais en vain. Quatre jours après, le 21 juin, elles cessent le travail.

Elles s'adressent à la section lyonnaise de l'Association internationale des travailleurs (AIT) pour leur venir en aide et créer un comité de grève. Ce dernier a obtenu du Conseil général l'autorisation d'organiser une collecte de soutien et des fonds ont alors pu être récoltés non seulement en France mais aussi en Belgique, en Angleterre, en Suisse

C'est ainsi qu'elle ont pu tenir un mois entier et étendre le mouvement vers d'autres ateliers, mettant aussi en place des bureaux de secours, se répandant dans les cafés et les rues. Après ce combat mémorable, elles demandèrent leur adhésion à l'AIT. Bien qu'il n'y eut pad de véritables leaders dans ce mouvement, plusieurs figures le dominèrent, comme Victorine Chavet et Philomène Rozan. Cette dernière fut proposée par Karl Marx en personne pour participer au Congrès de Bâle mais finalement, elle n'y participa pas, ce qui fut fort dommage pour la reconnaissance du rôle des femmes par la mouvance libertaire.

Si peu à peu la grève s’essouffla, les ovalistes obtinrent quand même la journée de 10 heures sans perte de salaire, soit 1,50 franc pour les femmes et 3 francs pour les hommes.

Notes et références
[1] Elle a écrit en particulier Mémoires libertaires - Lyon 1919-1939, L'Harmattan, 1993 ainsi que des biographies d'Emma Goldman et de Louise Michel
[2] Elle a écrit de nombreux ouvrages sur les roms, dont "La compagnie des Roms", Atelier de cration libertaire, 1994 et "Roms, Tsiganes, Voyageurs : L’éternité et après ?", éditions Indigène, 2010

[3] L’ovale était la pièce centrale du moulin qu’elles surveillaient
[4] Cette activité s’appellait aussi le moulinage
[5] Elles étaient payées 1,40 francs la journée de 12 heures


Bibliographie* Avec Annick Houel, "La grève des ovalistes", Lyon, juin-juillet 1869, Payot, 1982
* Avec Élinor Accampo, "Entre la classe sociale et la cité: identité et intégration chez les ouvriers de Saint-Chamond", 1815-1880, Le Mouvement social, no 118, janvier-mars 1982, p. 39-59
* Christine Passevant, "
Claire Auzias, Mémoires libertaires : Lyon 1919-1939", L'Homme et la société, vol.111, no 1, 1994, p. 195-196,

* Christine Passevant, "Claire Auzias, La compagnie des Roms", L'Homme et la société, vol.115, no 1, 1995, p. 147-148
* Mimmo Pucciarelli
, "Claire l'enragée ! entretien avec Claire Auzias", Éditions des Ateliers de création libertaire, 2006


Références complémentaires
* Bakounine et les ovalistes --
* Gaston Leval, L'humanisme libertaire --


< Christian Broussas – Claire Auzias - Feyzin, 26 juin 2015 - << © • cjb • © >

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