mercredi 8 décembre 2021

Jean-Baptiste Del Amo, Le fils de l’homme

 Référence : Jean-Baptiste Del Amo, Le fils de l’homme, éditions Gallimard, prix de roman FNAC 2021, 240 pages, août 2021

Un roman sombre sur la folie d’un père.

           

« J'ai voulu écrire un livre sur la transmission de la violence. »

 Difficile pour un auteur de connaître exactement les prémisses d’un roman. Del Amo n’échappe pas à la règle, pensant cependant, dit-il dans une interview : « Le Fils de l’homme m’apparaît comme un univers parallèle à celui de Règne animal (son roman précédent), une variation sur la famille, la transmission des pères aux fils, la violence des hommes, leur désir de domination. »

                   

Cette folie du père et la violence qui en résulte va précipiter sa famille à sa perte. Elle est à l’mage du décor choisi par l’auteur, la maison des Roches, la maison de son enfance dans une montagne sauvage et une forêt humide pas vraiment accueillante.

Le garçon va découvrir un milieu qui lui est totalement étranger : « Il se met en marche, la mère et le fils lui emboîtent le pas. Le garçon regarde autour de lui le calme du sous-bois où rien ne bruit, rien ne se meut. Il prend conscience de l'odeur de la montagne, un parfum violent pétri de pourrissement végétal, d'écorces, de polypores et de mousses gorgées d'eau, de choses invertébrées rampant en secret sous de vieilles souches et de roches friables dans le lit des ruisseaux. »

           
                                                Del Amo avec Vincent Ménage

 Pour son malheur, la jeune femme enceinte d’un autre, accepte d’aller avec son fils dans cette maison délabrée loin de tout. Le père espère ainsi tourner la page et solder un tragique passé, les tenir tous les deux sous son emprise, glissant alors dans une folie destructrice.

Une tragédie en forme de huis clos digne d’une tragédie grecque comme si rien n’avait vraiment changé dans ce type de rapports humains depuis les temps antiques. L’auteur oppose la dureté de cette vie dans la nature, soumise à l’état naturel, l’état primaire où l’enfant trouve à la fois un certain plaisir et une peur redoublée par la violence du père, à leur vie « d’avant », d’avant l’exil dans la maison du père.

                   

Avant, c’était la vie à deux, la mère et le fils, une vie douillette et sans peur, dans un coquet quartier pavillonnaire. Maintenant, c’est un univers où les forts asservissent les faibles, où l’enfant oppose le silence aux emportements paternels. Le relationnel entre eux passe essentiellement par le non verbal, le gestuel et la kinesthésie. 


Aucune psychologie marquée des personnages, pas de pathos non plus, aucune interprétation  qui puisse provenir d’un œil extérieur. Seules quelques remarques balisent la pensée comme ici celle du père : « … Je me suis promis de terminer de relever les Roches, d'achever ce que nous avions commencé ensemble, sans me douter qu'il y a des choses qu'il est préférable de ne pas réveiller, des souvenirs et des hommes qui doivent rester ensevelis. »

                     

Après la parution de Règne animal qui traite de la violence contre les animaux à partir d'une famille de paysans du Gers, Jean-Baptiste Del Amo revient sur ce thème de la violence entre générations qui agit comme une malédiction absolue comme s’ils ne pouvaient échapper à leur destin. 

Voir aussi
► Tanguy Viel, La fille qu'on appelle -- David Foenkinos, Le mystère Henri Pick
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Édouard Louis,  Qui a tué mon père et Histoire de la violence -- Philippe Solers, Légende --

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<< Christian Broussas, Del Amo 06/09/2021 © • cjb • © >>
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