Référence : Françoise Frenkel, Rien où poser sa tête, Editions Gallimard, collection « L’Arbalète », 336 pages, octobre 2025
« Un fond de sadisme doit être caché en tout homme pour se dévoiler lorsqu'une occasion se présente. » (p. 129)
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Un
livre rescapé, comme son héroïne elle-même, et sa fuite éperdue pendant
les années de guerre, ressuscité après des années de purgatoire. Et
republié soixante-dix ans après sa publication à Genève. [1]
Cette polonaise qui a fait ses études à Paris,
grande admiratrice de littérature française, ouvre une librairie
française en 1921 qui devient rapidement un centre littéraire renommé. [2] Mais, l’atmosphère en Allemagne devient vite irrespirable, surtout pour une juive comme elle et elle fuit ce pays en 1939.
Dès lors, c’est une fuite aléatoire sans savoir où elle va bien pouvoir, souffler « et poser sa tête. » Elle réussit toutefois à passer en Suisse. Tantôt dénoncée, tantôt secourue, emprisonnée avant d’être incarcérée. Elle est loin de perdre espoir, écrivant « Ce voyage au tribunal fut pour nous une réelle récréation. Il offrait l'occasion de quitter pour des heures la prison, de contempler le soleil, la forêt, les champs, les Alpes avec leurs cimes neigeuses, l'hiver dans toute sa splendeur. » (p. 212)
Elle
sera enfin libérée, rencontre des Français antagonistes, que la guerre
divise. C’est ce quotidien qu’elle relate avec autant de sensibilité que
d’objectivité.
Ce témoignage conserve, miraculeusement intacts, la voix, le regard,
l’émotion d’une femme qui réussit à échapper à un destin tragique. Elle
évoque par exemple la pratique épistolière des Français, « On écrivait partout, tout le monde écrivait. » (p 71) [3]
Notes et références
[1] C'est un niçois Michel Francesconi qui dénicha un exemplaire de ce livre dans un vide-greniers et fut la base de sa diffusion.
[2] Librairie
qu'elle tint avec son mari Simon Raichenstein qui sera raflé à Paris en
juillet 1942 et mourra en déportation un mois plus tard.
[3] Dans sa préface, Patrick Modiano écrit :« À notre époque, l'écrivain... s'interpose sans cesse entre ses œuvres et
ses lecteurs et devient un voyageur de commerce. On regrette le temps
de notre enfance où on lisait Le trésor de la Sierra Madre signé sous un
faux nom "B Traven", par un homme dont ses éditeurs eux-mêmes
ignoraient l'identité. »
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