vendredi 10 janvier 2020

Érik Orsenna Briser en nous la mer gelée

             

Référence :
Érik Orsenna, Briser en  nous la mer gelée, éditions Gallimard, collection Blanche, 464 pages, janvier 2020 


« Kafka avait raison, un livre doit être une hache pour briser en nous la mer gelée… L'amour, c'est pareil. » Érik Orsenna



Une histoire de coup de foudre ? Bof, direz-vous, rien de très original. Dès lors, tout va aller très vite : le lendemain, Gabriel demande Suzanne en mariage. Mais coup de foudre ne veut pas dire longévité. Malgré ce qui les lie, les vieux démons de leur vie précédente ressurgissent.

    

Pour réagir, il leur faudrait oser. Ce sera le divorce prononcé en octobre 2011 par la juge Anne Bérard, du TGI de Paris. Le fil conducteur du roman est une longue lettre qui lui est adressée pour la remercier car, tout en appliquant la loi, elle exprime sa conviction qu'« elle sentait en eux beaucoup d'amour ».
Gabriel, la mort dans l’âme, décide de s’exiler dans le Grand Nord où il se sent en communion avec ces étendues gelées. C’est alors qu’il va recevoir un message de Suzanne. Et tout va être remis en question.

Elle lui écrit : « Je sais que tu vas t'embarquer pour une traversée risquée. Alors je voulais que tu saches que je t'ai aimé ». Sur ce, elle débarque. Ils partiront donc ensemble en direction du détroit de Béring, vers les îles jumelles Diomède, l'américaine et la russe, où se situe la ligne de changement de date… pour mieux surfer sur le Temps sans doute !
 

Le détroit est comme un symbole géographique reliant, dit-il dans une interview, deux continents, l'amour étant aussi défini comme une géographie. Dans son roman Longtemps publié en 1998, Orsenna présentait déjà des amants qui se fuient et se retrouvent, les élans du corps et la géographie et qui vont s’apercevoir que la seule réalité, c’est le temps.  

La géographie, les espaces contrasté de la planète,  c’est sa préoccupation, son domaine, celui de L’archipel des mots et de l’île du subjonctif, celui de l’avenir de la faune et de la flore qu’il développe à travers les quatre tomes de son Petit précis de mondialisation. [1]« Le fou de géographie que je suis, dit-il dans une interview, avait envie de tisser dans ce roman une relation entre la géographie, le climat et le sentiment. »

        
La série Petit précis de mondialisation

Entre chaud et froid

Il est sûr que l’art, surtout la musique et la littérature, nous permet de dépasser nos défenses, de peser sur la part de froid qui est en nous, de mieux exprimer notre part de chaleur.
Pour lui, un mariage est réussi quand les oui l’emportent sur les non. Un chapitre de son roman s’intitule d’ailleurs « La ronde des oui et des non », le mariage étant une remise en cause constante.

Le froid participe au grand système climatique de notre planète et au "petit" fonctionnement des sentiments humains. « Je suis passionné par ces articulations, dit-il. Ce roman d’amour est aussi un livre de géographie, puisque la géographie est précisément la science des interactions et des différences d’échelles. »
 « Les histoires servent à s’y tenir au chaud, ajoute-t-il. Chaud ou froid, c’est selon mais affirme-t-il, « jamais tièdes… L’amour est décidément le premier territoire à explorer, et le plus difficile. »




Notes et références

[1] La série Petit précis de mondialisation comprend : Voyage aux pays du coton, L’avenir de l’eau, Sur la route du papier et Géopolitique du moustique -

A voir également :
* Mon site Éric Orsenna

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