Pour le 200ème anniversaire de sa naissance
Fédor Dostoïevski en 1872 Sa mère Maria Fiodorovna
Fédor (ou Fiodor) Dostoïevski (1821-1881), Cet anatomiste de l’âme, de ses beautés et de ses vilénies, aura eu une vie des plus tempétueuses, auteur d’une œuvre aux personnages souvent torturés et d’une vison de l’existence dominée par les thèmes de la rédemption et de l’humilité.
Splendeur et misères de l’âme humaine
On fête cette année le 200ème anniversaire de la naissance de celui qui disait c’est « la beauté qui sauvera le monde. »
Il est arrivé à puiser dans une vie difficile faire de prison, d’exil
et de dettes, un optimisme vrillé au corps qui l’a largement aidé dans
sa création littéraire.
Cet anniversaire est l’occasion de se replonger dans une œuvre qui a marqué la littérature mondiale, en particulier Les Possédés et Les Frères Karamazov.
Hôtel Marinsky où il est né, avec sa statue datant de 1919
Une enfance difficile
Un alcoolique et une brute : son père n’avait pas vraiment l’image du père idéal qui puisse aider un fils à prendre son envol dans la vie. Né le 30 octobre (ou le 11 novembre dans le calendrier grégorien) 1821 à Moscou, Fiodor Dostoïevski n’avait rien à attendre de ce père pourtant médecin.
Ce
père peu à peu devint paranoïaque, soupçonneux au point d’accuser ses
domestiques de le voler, affichait une parfaite indifférence vis-à-vis
de son fils Fiodor, toujours pessimiste et lui disant : « Écoute, Fédia, contrôle-toi, un jour tu auras des ennuis, et tu finiras avec le bonnet rouge des bagnards ».
Ce qui fut malheureusement le cas.
« L’homme est une énigme et cette énigme, il faut la mettre à nu. »
Échec personnel, succès littéraire
Dostoïevski abandonne vite sa vie militaire pour une vie de plaisirs et d’écriture et c’est en 1846 que paraît son premier roman, Les Pauvres Gens. C’est un succès.
On le surnomme « le nouveau Gogol », il est invité dans le « tout Moscou » où il cache sa timidité derrière une prétention de façade. Il regarde aussi du côté de la Révolution et un matin de 1849, il est enfermé dans la forteresse Pierre-et-Paul et conduit devant un peloton d'exécution.
Vladimir Makovski, "Le détenu", 1879
La mort de près : « Aujourd'hui, j'ai été à la mort... »
Il échappe à l’exécution par la grâce du tsar, qui adore jouer les généreux. Les fers aux pieds, il part pour la Sibérie à Omsk, condamné à quatre années de bagne. On imagine les conditions de vie...
Dostoïevski et sa femme Anna Snitkina
Pourtant, même soumis à ce régime inhumain, Dostoïevski parvient à rester lui-même et s’astreint à observer son nouvel univers et les gens qui le peuplent. Il constate la bassesse humaine, sa propension à faire le mal mais aussi l’intérêt de l’âme russe. Il côtoie des personnages qui le fascinent, écrivant dans sa Correspondance : « Que de types populaires, de caractères je rapporte du bagne ! […] J'ai appris à bien connaître, sinon la Russie, du moins le peuple russe ».
À sa sortie du bagne, qu’il nomme « la maison des morts », il rencontre en Sibérie celle qu’il va bientôt épouser, Maria Dmitrievna et publie un nouveau roman intitulé Humiliés et offensés en 1861. Mais il n’obtient qu’un petit succès qui ne lui permet pas de rembourser ses créanciers. Il décide alors de s’éloigner, part visiter l’Europe, Paris, Londres, Berlin, Bâle...
Sa maison à Staraïa-Roussa
Il découvre d’autres mondes, d’autres mentalités, s’ouvre à d’autres cultures mais au prix de dettes qui augmentent constamment comme dans son roman Le Joueur publié en 1865. Sa santé aussi se dégrade et il est de plus en plus affligé de crises d’épilepsie.
« L’homme est une machine si compliquée… »
Le joueur invétéré
Cette même année, sa femme Maria meurt de tuberculeuse, peu de temps avant son frère. Il supporte alors la charge de sa belle-sœur et de ses quatre enfants, ce qui grève encore ses finances.
En 1866, Crime et châtiment qu’il écrit aidé par une jeune sténo Anna Grigorievna Snitkina qu’il va bientôt épouser, est un immense succès. Ils repartent tous les deux sur les routes de l'Europe, faire la tournée des casinos et Anna y perdra même ses boucles d'oreilles !
Nikolaï Karazine, illustrations pour Crimes et Châtiment, 1893
La reconnaissance de l’écrivain
Dès lors, pour chaque roman, ce sera le succès et se succéderont L'Idiot (1869), L'Éternel Mari (1870) et Les Possédés (ou Les Démons) en 1872... Écrivain désormais consacré, il traîne dans les salons mondains.
Le 6 juin 1880, à Moscou, on inaugure une statue de Pouchkine où son discours est applaudi comme un modèle du genre.
Avant de s’éteindre en janvier 1881, il aura le temps de terminer Les Frères Karamazov, considéré par beaucoup comme son roman le plus célèbre et le plus achevé.
Note sur crime et châtiment
Le
titre donne bien le thème du roman : l'histoire d'un crime et de son
châtiment. Comme dans l'intrigue d'un roman policier, le jeune Ralskolnikov
concocte le meurtre d'une vieille usurière pour devenir "quelqu'un",
riche et célébré. Mais après la théorie, il faut agir et assumer ses
actes.
Dostoïevski nous entraîne dans les affres
d'une conscience confrontée à la culpabilité et aux réalités les plus
triviales. Il fouaille l'âme humaine pour en extraire les fragilités,
les failles insondables. Cette façon novatrice de traiter le roman et sa
volonté de sonder ce qu'on appellera l'inconscient, font de ce texte
l'une des oeuvres fondamentales de son époque qui exercera une influence
considérable sur la littérature.
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<< Christian Broussas, Dostoïevski 31/10/2021 © • cjb • © >>
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