Référence : Marc Dugain, Paysages trompeurs, Gallimard, 240 pages, septembre 2022
« Ce système (le libéralisme) est sans doute l’essence de notre nature moderne. C’est là que l’évolution nous a menés. »
Ben, Benjamin Vivant est un agent du renseignement, seul survivant d'un opération qui devant récupérer des otages en Somalie, pays instable en guerre civile. Pour tout le monde, Ben lui aussi est mort dans l'opération, « Aucune cérémonie à la mémoire de Ben et de ses compagnons n'a eu lieu. La République a profité du statut particulier de ces hommes pour taire son échec. »
Le lien entre ces deux événements, c'est le narrateur. Non seulement comme responsable d'une société qui crée des documentaires souvent dérangeants pour les pouvoirs économiques et politiques, dont celui avorté sur l'assassinat des touristes belges imputé à tort aux djihadistes, il est le meilleur ami de Ben. Cet homme bien introduit dans les milieux maroquins, va d'ailleurs aider Ben à organiser sa planque au Maroc. Il va "exfiltrer" Ben et Ida, la femme qui l'accompagne et pourtant l'a trahi lors de l'opération somalienne. Il aurait dû la liquider mais n'a plus le cœur à être l'homme qui obéit aveuglément aux ordres. C'est Lévia, l'amie du narrateur, qui va s'occuper de Ben et l'aider à se réadapter. Lui se souvenait de ses lectures et surtout de cette idée d'Albert Camus qu'on peut « réconcilier l'absurde de nos existences et leur possible utilité dont il faut forcer le chemin. » (p 86)
Mais finalement, tout va bien se terminer pour les protagonistes de cette histoire, Ben et Ida filer le parfait amour au Maroc, le narrateur revenir à Paris et Lévia continuer ses activités à Nuuk, la capitale du Groenland.
« Je trouvais que c'était intéressant de parler de quelqu'un qui m'a beaucoup aidé à structurer mon écriture, qui est Anton Tchékhov. »
Dans son avertissement, il précise : « Ce livre est inspiré de faits réels qui pour certains ont pris une autre direction ».
Pour lui, séparer réalité et fiction est quasiment impossible. Il avoue s'être inspiré d'histoires vraies (restées secrètes) qu'elles aient abouti ou non. Cependant, il les a totalement remodelées « sans dévoiler des secrets d'État, tout en montrant quand même le dessous des cartes ».
L'enjeu, ajoute-t-il,« c'est de dévoiler le dessous des cartes sans tomber dans le conspirationnisme. »
« Nous sommes dans une société du faire-semblant. »