lundi 11 septembre 2017

Patrick Modiano, Rue des boutiques obscures

 Référence : Patrick Modiano, Rue des boutiques obscures, éditions Gallimard, collection Blanche, 213 pages, septembre 1978

          

« Pour Modiano comme pour son héros, parcourir les rues de Paris, c'est tenir à la réalité de ce qui a disparu. » Paule Constant

Depuis son premier roman, Patrick Modiano flirtait avec le prix Goncourt mais cette fois en 1978, ce sera la bonne et il est même couronné pour « l’ensemble de son œuvre », ce qui est exceptionnel. [1]

Il fallait bien qu’un jour ou l’autre Patrick Modiano nous conte une histoire d’amnésie. C’est le cas de son héros Guy Roland, un détective qui décide de rechercher sa véritable identité perdue dans un mystérieux accident depuis une quinzaine d’années. Mais est-ce bien lui ces doubles auxquels il finit par s’identifier ?

                 
Avec Françoise Hardy   

Guy Roland va découvrir au fil de son enquête qu’il s’appelle en réalité Jimmy Pedro Stern, juif et grec de Salonique mais qui s’est installé à Paris sous le nom de Pedro McEvoy. Une triple identité qui ne facilite pas sa quête identitaire.

Il est alors entouré d’une cour d’amis comme Denise Coudreuse un mannequin qui vit avec un anglais Freddie Howard de Luz, une danseuse américaine d'origine russe Gay Orlow, André Wildmer un ancien jockey anglais, qui en 1940 se réfugient à Megève pour fuir la guerre et l'Occupation allemande. En compagnie de Denise, il décide de poursuivre cette fuite jusqu’au Portugal via la Suisse mais l’entreprise tourne court quand ils sont abandonnés dans la neige par leurs passeurs.

Il décide ensuite de partir revoir son ami Freddie qui est allé vivre en Polynésie à Bora-Bora après la guerre. Mais à son arrivée il apprend que Freddie a récemment disparu dans un naufrage. Il lui reste cependant une dernière chance pour renouer les fils de son passé, une adresse à Rome, 2 rue des boutiques obscures (via delle Botteghe oscure) où il aurait vécu dans les années 1930.

                  
Par Denis Cosnard             Par Didier Seillier

Voilà pour  le fil conducteur assez embrouillé auquel Modiano nous a habitués. Pour une fois, on est le plus souvent loin de Paris et même de la France mais la guerre rode encore dans la vie de cet homme au passé ponctué de zones d’ombre.

La présentation du roman sur le site Gallimard pose la question de savoir ce qu’il reste de la vie d’un homme quelconque après sa disparition. Quelques photos, quelques papiers… peu de choses « et aussi les souvenirs de ceux qui l’ont connu ou rencontré. » De moins en moins nombreux bien sûr au fil du temps avec des souvenirs qui s’estompent immanquablement. « Ainsi l’écho d’une vie décroît-il jusqu’à s’éteindre tout à fait […] l’intrusion des âmes errantes dans le roman policier. »

          

Les techniques utilisées, recherche d'un fait, précision d’un détail, introduction d'un personnage, enrichissent l'absence initiale qu'il faut élucider dans les blessures de son enfance et les conséquences de souvenirs rêvés. Modiano connaît les limites de ses investigations itératives, qui écrit : « Au fond, il s'agit, pour le romancier, d'entraîner toutes les personnes, les paysages, les rues qu'il a pu observer, dans une partition musicale où l'on retrouve les mêmes fragments mélodiques d'un livre à l'autre, mais une partition musicale qui lui semble imparfaite. »

 
Notes et références
[1]
Élu au troisième tour de scrutin avec six voix contre trois pour Diane Lanser de Jean-Didier Wolfromm et une pour La vie mode d’emploi de Georges Perec.

Sélections de romans
*
Fleur de ruine -- Dimanches d'août -- La ronde --
* Un cirque passe -- Remise de peine --
 *► Voir aussi mon Site Modiano et Ma Catégorie Modiano --

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