La fable de la maîtresse
« Ah ! Qu’elle est gentille ma maîtresse »
S‘exclamait le bambin avec tendresse,
Tout heureux de la présenter à sa mère
Pour entendre les mots qu’il espère.
La mère s’était mise en beauté
Et, par une belle journée ensoleillée,
Se prépara, partant le cœur tranquille,
A pas comptés, par les rues de la ville
Pour rencontrer cette fameuse maîtresse,
L’esprit fort serein et sans aucun stress.
Mal lui en prit et rapidement déchanta
Devant un accueil glacial qui la choqua,
Car aux premiers mots de la maîtresse,
Elle faillit en tomber sur les fesses,
D’autant plus qu’elle se demandait du coup
Ce qui pouvait bien motiver un tel courroux.
La maîtresse en effet se plaignit amèrement
Du comportement de ce garnement,
Toujours bougeant et brouillon,
Toujours cherchant ses crayons,
Toujours intervenant à contre temps,
Toujours content de lui, apparemment,
Toujours sous le bureau ou sous la chaise
Pour y graboter tout à son aise.
La pauvre mère
toute déconfite
S’en retourna chez elle bien vite,
La tête encore dans le brouillard
En se disant que sûrement plus tard
Son fils perdrait souvent ses clefs
Et resterait alors penaud sur le palier
Ou alors ferait encore bien pire
Et pour n’avoir pas l’air moins bête,
S’en prendrait à une pauvre boîte-aux-lettres
Qui refuserait obstinément de s’ouvrir.
La fable de la badine
et du trottoir
C’était au temps des Minguettes,
Un jour qu’ils revenaient d’une fête,
Le fils avait à la main une badine,
Simple baguette fort anodine
Mais la mère veillait, toujours attentive,
Toujours aux aguets, sur le qui-vive,
Toujours aux aguets, sur le qui-vive,
Vertement le serina, le mit en garde
Qu’il ne tombe et se blesse par mégarde.
« Jette-moi donc ce bout de bois,
Que tu es déjà si maladroit !,
Qu’un accident est si vite arrivé
Et que tu finiras par te le planter,
Et que tu finiras par te le planter,
Glisser sur le trottoir, verser
Dans le caniveau et t’éborgner ! »
Répéta la mère comme par devoir
Mais enfin sans trop y croire,
Nul discours qui n’atteigne le gredin
Car tous ses efforts restèrent vains.
« Cause toujours ! » soupira la mère
Avec un petit rictus amer,
Pour encore une fois rendre raison
A cette espèce de petit polisson,
Rien qui pût vaincre sa position
Et réussir à le faire changer d’opinion.
Pensée sensée, paroles prémonitoires
Qui résonnèrent alors sur le trottoir ;
Le fils indigne en effet, déconfit,
Comme sa mère l’avait prédit,
Ratant dans un cri une marche vicieuse
Chut lourdement sur la chaussée visqueuse.
Que croyez-vous donc qu’il arriva
Après ce malencontreux faux-pas ?
Les stigmates visibles de son forfait,
Même après tout ce temps, sont en effet
La preuve marquante de sa forfaiture,
Se dessinent encore à la commissure
Des lèvres en une éternelle présence,
Trace indélébile de sa désobéissance.
La morale de cette édifiante histoire
N’est inscrite dans aucun grimoire,
Et même une telle expérience
Ne pouvait dans cette circonstance
Contraindre une sacrée caboche
A n’être qu’une tête de pioche ;
Mais que s’opposer ainsi et contester
Est aussi façon d’affirmer sa liberté.
Portrait sur le vif
Portrait sur le vif
« Ah,
ainsi c’est tout son grand-père »
S’exclamait
mamy Marie très fière,
« Et il est vraiment si mignon
Sanglé
dans son joli pantalon ! »
Il
ne manquait aucun superlatif
Pour
saluer la venue de ce petit-fils.
Et
ainsi attifé, n’est-il pas trognon
Même
avec son petit air bougon,
Montrant
aussi sa binette débonnaire
Tout
en jouant avec ses affaires.
Ces
dames étaient en admiration,
Sa
pâmant devant l’admirable rejeton,
Tandis
qu’il trônait du haut de sa chaise
Bien
calé dans le dossier, tout à son aise.
Même
sa sœur, conquise, est à l’unisson,
Commentant
la scène de sa "petite" voix,
Qui
ne lui écrasait pas encore les doigts
Quand
il lui barbotait ses bonbons
Et
planquait les papiers, objets du délit,
En
un tas multicolore, sous son lit.
En
vacances, vers Jars ou Trégastel
Ou
vers Guérande et ses parcs à sel,
Il
a encore mine d’enfant, visage poupin
Tout
étonné derrière son air mutin,
Ses
mains potelées et sa petite tête
Ronde
dissimulée sous sa casquette,
Modelant
un énorme château de sable
Branlant
sur un sol meuble et instable.
Puis
le zoom cadre un autre univers,
Toute
une longue litanie à la Prévert
Ponctuée
ci et là de jadis et de naguère,
Allers-retours
entre la sœur et le frère,
Et,
à Gex par un jour de beau temps,
Comme
Villon et ses neiges d’antan,
Blancheur
immaculée couvrant ses flancs,
Il
ferme les yeux et voit le Mont Blanc.
<> Voir aussi le site Poètes et Poésies <>
<< Christian Broussas - Poésies, Fables - 14 mai 2013 • © cjb © • >>
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