Référence : Marguerite Duras, Yann Andréa Steiner, éditions P.O.L., décembre 1992 et Gallimard/Folio, 2001
« Gris comme l'intelligence immanente de la matière, de la vie. » (p 51)

Le roman très autobiographique est basé sur la rencontre entre Marguerite Duras et Yann Andréa à Trouville dans les années 80, « C’était l’été 80. L’été du vent et de la pluie. L’été de Gdansk. »C'est par un été particulier où une romancière "âgée et isolée", rencontre un jeune homme seul lui aussi. Avec en toile de fond, une vie plus tumultueuse qui sera la leur par la suite.
On y retrouve ses thèmes préférés : le sentiment amoureux, l'ambivalence de l'écriture (fragile et forte), l'enfance, l'alcool et la solitude. Elle y évoque aussi un roman avorté intitulé "Théodora Kats" et la rencontre entre une monitrice de colonie et un jeune, rappelant leur couple.
Ce roman se présente aussi comme une réécriture de "L'été 80" où l'on retrouve le jeune et Jeanne sa monitrice. Yann Andréa confie également dans "Cet amour-là" qu'elle a repris des lettres qu'il lui a écrites avant leur première rencontre.
« La mémoire vous en vient parfois dans le plein soleil de la plage à travers la transparence des rouleaux de vagues. » ( p 55)
Cette histoire commence par sa rencontre avec Yann Andréa, sont
dernier amant qui l'a accompagnée durant 16 ans, jusqu'à sa mort. Sa
particularité réside dans le fait qu'ils ont 38 ans d'écart et qu'il est
homosexuel. Le livre s'appuie sur des textes qui datent de l'époque de
leur rencontre, notamment ceux de "L'été 80" qui est un recueil des chroniques quotidiennes que Marguerite Duras a publiées durant cet été là dans le journal Libération.
On y trouve cet enfant aux yeux gris de la colonie de vacances, la plage de Trouville,
la monitrice et ses histoires... où on est aussi projeté dans la guerre
et la déportation, des juifs en particulier, et la déportation de son
mari Robert Antelme qui fait qu'elle y est vraiment sensible.
Un livre composé d'histoires imbriquées qui marquent bien la signature de Marguerite Duras.
« Une sorte de folie de la normalité s'était peut-être emparée d'elle, de son esprit, de son corps. » (p 48)
Yann Andréa et Marguerite
Dans ce roman, Marguerite Duras varie les styles, parlé dans les dialogues avec Yann Andréa, la technique de la répétition, parfois un style plus littéraire comme « Dans les yeux de l'enfant, il y a de nouveau la légère crainte de la vie.» (p 63) L'écriture, la grande affaire pour elle, c'est comme une focalisation, presque une maladie. [1]
Elle définit l'écriture à l'aune de sa sensibilité : « Qu'écrire
pour moi, c'était comme pleurer. Qu'il n'y avait pas de livres joyeux
sans indécence. Que le deuil devait se porter comme s'il était à lui
seul une civilisation, celle de toutes les mémoires de la mort décrétée
par les hommes... »
Notes et références
[1] Elle écrit ici « Vous me disiez : "Qu’est-ce que vous croyez faire ? Qu’est-ce que cela veut dire ? Être à écrire tout le temps, toute la journée ? Vous serez abandonnée… intenable à vivre". » (p 73)
Voir aussi