Théodore de Banville par Félix Nadar
Théodore de Banville (1823-1891), ça vous dit quelque chose ? Peut-être, la chanson de Georges Brassens intitulée Le verger du roi Louis, vous dit-elle quelque chose, bien qu’elle ne soit pas vraiment connue. Brassens, fait assez rare pour lui, a mis en musique ce poème pour sa musicalité mais sans doute aussi parce qu’il est un hommage à François Villon et une référence à sa Ballade des pendus.
Brassens mettra également en musique un poème de François Villon sous le titre La Ballade des dames du temps jadis. Théodore de Banville quant à lui, écrira un court poème en hommage à François Villon, qu'il intitula simplement Dizain à Villon.
Celui qu'on appelait « le poète du bonheur, » ami d’Hugo, de Théophile Gautier et de Baudelaire, Théodore de Banville a joué un rôle important dans les lettres françaises, considéré comme l’initiateur du mouvement des parnassiens.
Dans son poème Ballade de Victor Hugo père de tous les rimeurs, s'il reconnaît que « Gautier parmi ces joailliers est prince, et Leconte de Lisle forge l’or dans ses ateliers », il écrit comme une litanie que « le père est là-bas, dans l’île, » faisant référence à l'exil de Victor Hugo à Guernesey. Il écrivit aussi un poème intitulé "À Auguste Vacquerie", après la noyade tragique qui coûta la vie à son frère et à sa femme Léopoldine, la fille de Victor Hugo.
Il rejetait autant le courant réaliste que l’évolution du courant romantique qu’il condamnait, cherchant entre les deux son inspiration. Il hébergea un temps Arthur Rimbaud qui se montra ingrat en critiquant ensuite son style poétique.
Dans son poème Ballade sur lui-même (tiré de son recueil Trente-six ballades joyeuses), il confesse qu'il se considère comme "un poète lyrique" et se traite « d’assembleur de rimes ».
Il fut aussi un critique dramatique influent, un chroniqueur littéraire travaillant pour les journaux « le Pouvoir » en 1850 puis « le National » en 1869, devenant une figure majeure du monde littéraire, membre de la « Revue fantaisiste » où se réunissent en particulier les poètes du « Parnasse ».
En 1872, il publie son Petit Traité de poésie française, rompant ainsi avec le courant symboliste. Très prolifique, il publie dans les années suivantes un recueil de poèmes chaque année. Il s’est particulièrement intéressé à la forme poétique, utilisant toutes les nuances de la poésie française.
Théodore de Banville Les Roses et l'été
On lui a parfois reproché un certain formalisme au détriment de la
sensibilité et de l'imagination mais son originalité lui permit
d’exercer une grande influence sur la génération montante de la poésie
française. Il a été comme une plaque tournante entre les mouvements
réaliste, romantique et symboliste.
Il fut un inconditionnel de Charles Baudelaire, aussi bien de l'homme que de son oeuvre, s'occupant de la troisième édition des "Fleurs du mal" et le 2 septembre 1867, devant une assistance clairsemée, faisant l'éloge du poète, sur sa tombe au cimetière du Montparnasse.
Le verger du roi Louis
Sur ses larges bras étendus,
La forêt où s'éveille Flore,
A des chapelets de pendus
Que le matin caresse et dore.
Ce bois sombre, où le chêne arbore
Des grappes de fruits inouïs
Même chez le Turc et le More,
C'est le verger du roi Louis.
Tous ces pauvres gens morfondus,
Roulant des pensers qu'on ignore,
Dans des tourbillons éperdus
Voltigent, palpitants encore.
Le soleil levant les dévore.
Regardez-les, cieux éblouis,
Danser dans les feux de l'aurore.
C'est le verger du roi Louis.
Ces pendus, du diable entendus,
Appellent des pendus encore.
Tandis qu'aux cieux, d'azur tendus,
Où semble luire un météore,
La rosée en l'air s'évapore,
Un essaim d'oiseaux réjouis
Par-dessus leur tête picore.
C'est le verger du roi Louis.
Prince, il est un bois que décore
Un tas de pendus enfouis
Dans le doux feuillage sonore.
C'est le verger du roi Louis.
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<< Christian Broussas, Théodore de Banville 04/07/2021 © • cjb • © >>
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